Le Retournement de la Sphère

8 décembre 2004

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Permutation des points cuspidaux d'une crosscap

Ceci va constituer un petit intermède, sur le mode "à quoi peut servir le retournement de la sphère ? ". Ici : à permuter les deux points cuspidaux d'une Crosscap, ce qui pouvait sembler a priori impossible. J'ai inventé ce petit truc il y a une bonne douzaine d'années. Ca n'a jamais été publié. Mais où publier ce genre de chose? On ne sait pas trop. Il ne s'agit pas "d'un résultat majeur en mathématiques", mais c'est un xercice quand même assez séduisant. Dans ce qui va suivre on va faire usage de représentations polyédriques. A droite la Crosscap "ronde" et à gauche une de ses multiples représentations polyédriques possibles.

La Crosscap avec une de ses multiples représentations polyédriques.

Dans la figure en bas et à droite on s'est arrangé pour loger les deux points cuspidaux C1 et C2 situés à l'extrêmité de sa ligne d'auto-intersection dans ce qu'on peut considérer comme une portion de sphère. Nous savons que nous pouvons retourner une sphère. Donc nous pouvons faire subir à cet objet le même traitement, sans nous préoccuper des différentes étapes de cette transformation. En polyédrique cela consistera à retourner le cube.

Tout ce que nous savons c'est qu'en fin d'opération on aura deux sortes d'invaginations qui se présentent comme ce que verrait un observateur qui se situerait "à l'intérieur" de la Crosscap initiale ( ce qui est une expression impropre puisque cette surface est unilatère ).

Après retournement, du cube à gauche, de la sphère à droite

La représentation polyédrique est quand même sacrément commode pour ne pas perdre le fil de ces opérations. Il ne reste plus qu'à enfiler deux doigts dans ces invaginations et de tirer le tout vers l'extérieur :

Tirer le point cuspidal C2 "à l'extérieur"

Si cela vous amuse, vous pourrez construire les modèles polyédriques avec du carton. A moins qu'un courageux ne construise ces modèles en vrml pour qu'on puisse les manipuler.

Il ne reste plus qu'à finaliser l'opération.

Passage à une immersion identique à celle du départ, avec les points cuspidaux permutés.

J'ai promis, un jour, de faire un dossier racontant mes rencontres avec le psychanalyste Jacques Lacan. La Crosscap lui avait servi pour modéliser le "fantasme fondamental". Il s'était polarisé sur le "point cuspidal central" et négligeant simplement le second. En cette région centrale Lacan avait localisé le "phallus linguistique" ou "objet petit a". Je vous raconterai le reste une autre fois. Toujours est-il que Lacan n'avait pas prévu que ces points puissent être " père - mutés ". En fait, quand il m'avait parlé de cette modélisation linguistico - géométrico - psychanalytique j'avais froncé les sourcils en imaginant que dans cette Crosscap les deux points cuspidaux puissent jouer les rôles différents et, dans la seconde qui suivait, simplement en m'étant posé la question, j'avais trouvé comment les échanger. Lacan en fut assez sidéré, je me rappelle. Son fantasme fondamental avait deux phallus linguistiques au lieu d'un seul. Toute son affaire avait été articulée autour de cet objet. Mais je lui ai aussitôt proposé une solution de rechange en situant le phallus linguistique au pôle (unique) d'une surface de Boy. Ainsi, tout rentra dans l'ordre à sa grande satisfaction.

Cet épisode se situe assez peu de temps avant sa mort. A ce que j'ai pu constater, ce redéploiement psychanalytico-géométrique n'a apparemment pas encore diffusé au sein de la communauté des psychanalystes lacaniens.

 

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