Footballeurs nets d'impôts
Auteur inconnu.Trouvé sur la "messagerie interne
sur service des impôts" par Guillaume Dereuder,
qui se décrit comme "fouinaute"
L'exonération fiscale pour les joueur professionnels
est une loi sur-mesure en France, ou des comptes off-shore pour
les gunners d'Arsenal, permettant de "d'économiser"
des millions d'impôt...
Le 14 octobre dernier, l'Assemblée nationale adoptait
la proposition de loi de deux députés UMP, autorisant
la rémunération des sportifs professionnels sous
la forme de "droits d'image". 30% du salaire brut
de ces sportifs, désormais assimilés à
des "artistes", échappent aux charges patronales
et définissent une imposition plus favorable pour les
joueurs, pour le plus grand bonheur de tous — et de la
Ligue en particulier, qui avait fait de cette mesure un de ses
objectifs politiques prioritaires. Accueillie dans l'indifférence
générale, cette loi a prouvé que l'on pouvait
faire des exceptions fiscales pour des franges de "citoyens"
aussi favorisés que les footballeurs, sans que le contribuable
lambda y trouve à redire, bien que ce soit lui qui finance
le cadeau...
Les footballeurs, ces chers intermittents du spectacle
La mesure a ensuite été discutée quant
à ses modalités d'application. Ainsi, elle supposait
a priori que le footballeur devrait désormais se déclarer
en tant que travailleur indépendant, et donc, à
ce titre, facturer ses droits d'images et ainsi payer la TVA,
la taxe professionnelle. Mais c'était trop leur demander,
et Jean-François Lamour a insisté pour qu'ils
soient exonérés de ces taxes et cotisations sociales,
comme l'avait instamment demandé Frédéric
Thiriez, président de la Ligue.
Tous ceux qui, dans ce pays, travaillent en "freelance",
apprécieront de ne pas profiter des mêmes largesses
malgré la précarité de leur statut et de
leurs revenus. Tout le monde n'a pas la chance d'avoir Thiriez
pour avocat. "Au final, nos sportifs devraient échapper
à tous les impôts qui pourraient être collectés
sur les droits d'image sauf la CDG et la CRDS, et bien évidemment
l'impôt sur le revenu (...) Moralité, la loi exonère
les sportifs (...), la ligue définit les conditions de
mise en œuvre de la loi et le contribuable paye les charges!",
notait le site infosport.org fin janvier dernier.
Des négociations se sont également déroulées
entre l'UCPF (l'organisation des clubs) et l'UNFP (le syndicat
des joueurs) sur ce "droit à l'image collectif",
aboutissant à un texte qui s'applique aux joueurs dont
les émoluments sont d'au minimum 120.000 euros annuels
bruts (1). Ce sont dorénavant la L2 — en abaissant
le plafond à 60.000 euros, comme le permet la loi —,
mais aussi les autres sports professionnels, qui espèrent
obtenir des dispositions similaires.
Off-shore, of course
Comme le soulignait L'Équipe magazine (26 mars), le principe
du droit à l'image était déjà en
vigueur dans de nombreux clubs, dans des conditions particulièrement
opaques — notamment avec le versement de sommes aux joueurs
sur des comptes off shore, par exemple via les filiales étrangères
des sponsors du club. Les experts interrogés par l'hebdomadaire
doutent que ces pratiques cessent totalement, mais estiment
que la réduction des "disparités fiscales"
entre la France et les pays voisins permettrait "d'enrayer
la fuite de nos meilleurs joueurs vers l'étranger".
On peut en douter, car l'attrait d'un transfert juteux, immédiatement
rémunérateur, ne cessera pas d'être une
tentation pour nos clubs formateurs...
De toute façon, le dogme du "football français
handicapé par la fiscalité nationale"
n'est qu'un outil idéologique éculé, et
même dans un pays aussi généreux avec les
gros salaires que l'Angleterre — paradis officiel du foot-biz
— les clubs trouvent encore la motivation (et des moyens)
pour échapper à l'impôt. C'est ainsi qu'en
juillet dernier, le Sunday Times révélait le dispositif
d'évasion fiscale légale (!) mis en place par
le club d'Arsenal. Le lièvre a été levé
dans des conditions plutôt pittoresques, puisque c'est
à cause de contentieux financiers dans le cadre du divorce
de Ray Parlour que le montage a été révélé...
Ce dernier a permis aux joueurs (et à Arsène Wenger)
de réduire de 25% leur imposition.
L'information a été presque totalement occultée
en France, en dépit de son caractère particulièrement
édifiant. Nous reproduisons ici des extraits de l'article
de Robert Winnett et David Robertson, paru le 18 juillet dernier
(2).
"Les stars d'Arsenal détournent des millions d'impôts"
- Sunday Times
Le Club d'Arsenal, en tête de la première division,
a établi un dispositif d'évasion fiscale pour
ses joueurs et son dirigeant. Grâce à des sociétés-écrans
anonymes et à des sociétés fiduciaires
offshore, le club peut assurer de substantielles récompenses
à ses joueurs et faire en sorte qu'ils échappent
à l'impôt pour quelques millions de livres sterling
chaque année. [...] Ainsi, des joueurs étrangers
comme l'attaquant français Thierry Henry ou le joueur
vedette hollandais Dennis Bergkamp, ainsi que le directeur sportif
Arsène Wenger sont "dispensés d'impôt"
sur leurs primes à six chiffres [...].
Ces joueurs signent, en fait, deux contrats. Le premier porte
sur un salaire annuel de base imposé pour l'essentiel
de façon classique au taux maximal de 40% auquel s'ajoute
la contribution sociale. Cependant, les joueurs ont également
un second contrat "fantôme" concernant les primes
liées à leurs résultats [...]. Ces primes
peuvent représenter jusqu'à la moitié de
leurs rémunérations globales et sont payées
par l'entremise de deux sociétés-écrans.
C'est en 2001 qu'Arsenal a monté une entreprise le plus
discrètement du monde sous l'appellation Sevco 1270,
société dont ses joueurs de l'équipe phare
sont actionnaires. La comptabilité officielle du club
ne mentionne pas l'existence de cette entreprise dont le but
est d'assurer le versement des primes de jeu sous formes de
dividendes.
Les documents fiscaux les plus récents en provenance
de Sevco révèlent que ces versements ont été
assurés en direction d'un cabinet fiduciaire établi
dans l'île anglo-normande de Jersey. Par ce biais, les
joueurs ainsi rétribués peuvent, en toute légalité
selon les experts en transactions financières, se soustraire
à tout impôt et aux obligations d'assurances sociales
liées au salaire. [...] Thierry Henry, par exemple, a
vraisemblablement réalisé une "économie"
de 70.000 livres sterling environ, soit un peu plus de 110.000
euros. [...] D'autres clubs utilisent de tels dispositifs décrits
par un expert comptable, qui a souhaité conserver l'anonymat,
comme étant "à l'avant-garde des stratégies
visant à se soustraire à l'impôt en ayant
une longueur d'avance sur les services fiscaux". [...]
Ces techniques étaient jusqu'alors l'apanage quasi exclusif
des firmes financières actives sur les créneaux
de la spéculation à risque et des banques d'investissement
de la City londonienne. [...] Le cabinet Deloitte and Touche
(à l'origine du montage financier du club Arsenal) n'a
pas souhaité s'exprimer sur ces faits ; le club a seulement
rappelé le caractère confidentiel des contrats
le liant à ses joueurs.
(1) Le salaire annuel moyen d'un joueur de L1 est de 480.000
euros bruts ( soit 26 "briques" par mois )
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