La Chine, dossier n°1

 

 

Pomagalsky, 21 mars 2006 :

Chapeau J.P.Petit :

Les francophones et en particulier les Français commencent à se dire que, décidément, la Chine est en train de peser de plus en plus sur l'histoire du monde. Ils ne comprennent encore pas très bien pourquoi ou comment, mais réalisent que, de plus en plus, quand ils achètent quelque chose il est écrit dessus "made in China". C'est la perception confuse et floue qu'ils ont de la Chine ( et bientôt de l'Inde ). Ce qu'ils n'imaginent pas c'est que cet état de fait est le résultat d'une évolution en Chine qui a démarré il y a vingt ans.

Il y a aussi que vingt ans, en Chine, c'est beaucoup, alors que dans nos vieux pays, en vingt ans, il ne se passe pas grand chose, sauf que les choses vont simplement de plus en plus mal, avec une douce régularité, un total manque d'imagination ( ou plutôt un bridage serré des imaginations ) et que nous sommes "dirigés" par des imbéciles, des inconscients qui sont les plus souvent les deux à la fois. Ou par des gens qui se disent "comment vais-je faire pour gagner les prochaines élections ?" et qui prennent des mesures qui ne sont que des emplâtres sur une jambe de bois.

Aujourd'hui des leaders politiques du monde devraient s'efforcer de comprendre et de faire comprendre que les problèmes du monde sont réellement devenus "mondiaux" et que la mondialisation des économies est aussi la mondialisation des problèmes à résoudre. La situation du monde entier est comparable à celle de la France juste avant la Révolution de 1789. On avait alors organisé " Les Etats Généraux " où on avait demandé à tous les gens de décrire les problèmes qui étaient les leurs. Mais ça n'a pas marché, parce que les privilégiés ne voulaient pas perdre un seul de leur privilèges et tout a fini par exploser. On a fini par voir dans les rues des têtes coupées au bout de pîques pendant que les sans-culotes chantaient :

Ah, ça ira, ça ira, ça ira
L es aristocrates à la lanterne
Ah, ça ira, ça ira, ça ira
Les aristocrates, on les pendra

Ici, dans le monde, il n'y a même pas ce projet d'Etats-Généraux du monde. Déjà de Gaulle disait " l'ONU, ce Machin...". Comme on le lira dans les deux textes de Pomagalsky les manoeuvres économiques des uns et des autres se doublent de manoeuvres stratégiques, d'un côté comme de l'autre. Au Moyen-Orient les Américains "ne luttent pas contre le terrorisme" qui n'est q'un prétexte. Ils cherchent à limiter, à retarder l'accès de la Chine aux grandes sources d'approvisionnement en pétrole et son fulgurant développement. .

Comme le souligne encore Pomagalsky, si les Américains font cela, ça n'est pas par cupidité, bien que les dirigeants du pays aient tous eux des liens étroits avec les compagnies pétrolières ( Exxon, etc.... ). Les Etats-Unis luttent pour leur survie à relativement brève échéance ( 20 ans ). Comme on le verra la Chine s'arme discrètement, en tentant de dissimuler l'ampleur de son véritable budget des armements. Des alliances se nouent, sans le moindre état d'âme. Demain des pays passeront des "accords" parce que c'est leur intérêt, économique, stratégique commun en se foutant éperduement "de la démocratie" ou "des droits de l'homme ou .. de la femme". Des pays qui sont la Chine, la Russie, l'Iran et même la Corée du Nord.

Tout cela dépasse largement le contre-coup que ressentent les populations des pays européens, qui constatent que de plus en plus de produits viennent de Chine et que de plus en plus d'Européens sont dans la rue, sans travail.

La Chine est un géant dont on a du mal à imaginer l'ampleur, la force et il en est de même pour l'Inde. La situation actuelle n'est pas due au hasard. Ca n'est pas une surprise. C'est le résultat de vingt années d'un effort soutenu, lié à la façon dont la Chine a décidé de se transformer en armée, en " marabunta " ( les fourmis guerrières qui se mettent marfois en marche en Amérique du Sud et qui dévorent tout ). Elle ne fait pas cela pour nuire au reste du monde. Elle fait cela pour sortir de la misère où elle a vécu si longtemps. Pour cela les cadres très autoritaires du Parti Communiste Chinois sont utilisés à fond. Ainsi la Chine est une dictature très efficace. En Chine les syndicats n'existent tout simplement pas.

Il y a, exception faite de "singularités tehniques frontalières", comme les Ouinours muslmans, dont Pomaglasky parle, une remarquable unité ethnique et culturelle. La Chine est essentiellement pragmatique et ... nationaliste. Je crois que c'est le mot qui caractérise le plus les Chinois et qu'il faut se graver dans la tête. Elle est "sans états d'âme". L'ensemble de la population chinoise a aussi une immense revanche à prendre. Les atrocités japonaise ( les essais d'armes bactériologiques menés par le général Hi Shi en Mandchourie ), les massacres, la guerre de l'opium n'ont pas été oubliés.

La Chine se moque éperduement des conséquences économiques et sociales que son expansionnisme économique, bien légitime, créent dans le reste du monde. Les Chinois appliquent simplement les régles du jeu ( libérales ) qui sont de mise dans le reste du monde et dont on s'était servi, jadis, pour mettre l'Empire du Milieu en coupe réglée. Mais ils ont l'impolitesse de le faire avec une efficacité stupéfiante. Ce sont des comerçants légendaires. Lorsqu'on fait des affaires avec des Chinois on a 99 % de chances de se faire avoir, avec le sourire. Les Occidentaux sont sur ce terrain-là d'une naïveté incroyable ( je pense aux gens d'Eurocopter qui ont décidé de collaborer avec les Chinois pour produire ensemble des hélicoptères ). Les Chinois savent admirablement jouer sur la concurrence pour traiter alternativement avec l'un ou l'autre des partenaires pour obtenir ce qu'ils souhaitent avant tout : le transfert technologique. Pour emporter la marché et gagner ainsi un avantage à court terme il y aura toujours un imbécile pour fournir les plan, le mode de fabrication, et qui reviendra en disant "nous avons gagné sur tel ou tel pays concurrent".

Les Occidentaux, inconsciemment, conservent une idée assez primitive des Chinois. Ils ont dans leur tête une image d'êtres dépenaillés, barbares et frustes, véhiculée par de vieux films comme "La canonière du Yang Tsé" ou "les cinquante cinq jours de Pékin", avec un Charlon Heston ( un film retraçant le sièges des légations étrangères de Pékin par des "hordes déchaînées" à l'époque où les Occidentaux mettaient le pays en coupe réglée, appliquant un colonialisme dans le moindre état d'âme ). Là, des occidentaux "civilisés" font face à des hordes brutales et sanguinaires, fourbes, ne reconnaissant que la force, ignorant la pitié. La vision générale reste colonialiste. L'image du Chinois évoque celle de l'Indien des Westerns des années cinquante ou celle "du jaune" des séries B américains. Les occidentaux les imaginent mal intelligents, créatifs, capable de se doter d'un savoir de pointe dans toutes les directions. Cette sous-estimation est un phénomène général. Dans les années cinquante les occidentaux sous-estimaient complètement les Russes, par exemple dans le domaine spatial. Comment des gens aussi mal habillés, incapables de produire de bons rouges à lèvres et des chaussettes de bonne qualité, dotés d'ordinateurs à lampes ressemblant à de vieux oscilloscopes des années cinquante, avec un design à chier, pourraient-ils s'aventurer dans l'espace ? Jusqu'à la fin des années soixante je me rappelle que dans des congrès le premier soin des soviétiques, quand ils arrivaient à l'étranger était d'aller s'acheter des chaussettes en synthétique qui, enfin, ne leur dégringolaient plus sur les mollets.

J'ai déjà raconté la stupéfaction des Occidentaux découvrant en 1982 l'existence d'une MHD Chinoise aussi avancée que la leur, bouillonnant dans des complexes scientifiques ressemblant à de vieilles cimenteries. Il subsiste il est vrai en Chine beaucoup de misère. La terre chinoise est pauvre et les pluies rares. Pomagalsky vous fournira des chiffres éloquents. A Shangaï on est en plein dans le troisième millénaire mais ce "miracle Chinois" se situe surtout das la bande côtière, sud-est. Il suffit de prendre un train et de faire cent kilomètres pour vite retrouver des campagnes pouilleuses. En Chine on a coutume de dire "qu'on mange tout ce qui vole, sauf les avions". On mange les chiens. Il existe effectivement des restaurants, quoique cela soit en principe interdit, où on peut manger des animaux vivants dont, suprème raffinement, les cervelles de singes décapités devant le client. Les paysans pauvres vendent leurs enfants quatre cent wuans à des "services", à des fonctionnaires qui les revendent à des étrangers qui souhaitent les adopter, pour dix fois plus, en se mettant au passage ce confortable supplément dans la poche. Les droits de l'homme restent une notion assez vague, dans un pays aussi immense. L'Occidental assimile ce qu'il perçoit comme de la barbarie (alors qu'il fait parfois bien pire en utilisant la famine comme arme ) et à de l'arriération. Mais il ne faut pas oublier que la Chine est le troisième pays à avoir mis des hommes dans l'espace, ce qui implique tout un arrière-plan scientifique et technique que les Européens ne possèdent pas.

Quand les Occidentaux commercent avec la Chine Ils se perçoivent naïvement comme dotés d'une avance technologique difficile à rattrapper. Grossière erreur. Le réveil, proche, sera extrêmemnt brutal. Les Chinois "digèrent" tout, en silence et avec le sourire. Ils digèreront tout, les TGV, les Airbus, les hélicoptères, l'informatique, l'électronique, l'armement, toutes les technologies de pointe et mettront sur le marché des produits un jour plus performants. S'appuyant sur le faible coût de leur main-d'oeuvre ( pas de charges sociales ! ) ils envahiront tous les marchés, sans exception. Imparable. Ils ne sont pas handicapés, comme les Japonais, par le manque manque d'imagination. La technologie ? Ils l'ont inventée à l'époque où nous étions, nous, de complets barbares. Ils sont aussi disciplinés que les Japonais, éventuellement grâce à la contrainte de fer du Parti. Ils ne souffrent pas de l'absence de sens commercial des Russes.

Il existe en Chine une corruption généralisée, à tous les niveaux, qui n'a pas changé depuis .. des milliers d'années. Tout le monde le sait et on fait avec. On trouve le même système au Moyen-Orient (Bakschish) et en Afrique ( les comptes en Suisse des dirigeants, qui ne font aucune différence entre l'argent du pays et leur propre porte-monnaie ). La différence est que cette corruption ( le mot n'est pas trop fort ) est en Chine compatible avec un développement technologique alors que dans les pays Africains et Orientaux elle gangrène simplement les pays.

Les Chinois savent qu'ils ont été un très grande nation, et s'ils l'ignorent, on le leur enseigne, on leur grave cela dans la tête. Les Européens ont perdu confiance en eux. Nous ne menons plus que des combats d'arrière-garde. Nos mesures politiques, nos "plans de relance" ne sont plus que des emplâtres sur des jambes de bois. Quelle jeunesse, en France, ayant totalement perdu confiance dans ses dirigeants et dans le lamentable système qui gère le pays dirait "nous sommes une grande nation !". La combattivité, l'ambition sont en Chine des attitudes de simple survie, car il n'existe ni couverture sociale, ni système de retraites. En France cohabitent des nantis sans imagination, servis par une classe politique et une presse qu'i ne sont que l'émanation de cette minorité, qui ne songent qu'à "délocaliser" pour gagner plus, et des assistés sans avenir, fussent-ils incultes ou ultra-diplômés.

Les Chinois sont disciplinés, peut être par nature, mais aussi parce que chez eux l'indiscipline est simplement impossible. Platon disait :

- Les cimetières sont pleins de gens qui se croyaient indispensables

En Chine on dira :

- Les rues sont pleines de gens qui se croyaient indispensables

Le budget de l'éducation et de la recherche sont en Chine considérables. Ces usines à enseigner produisent à rythme élevé des diplômés, des jeunes détenant un savoir des plus modernes, qui n'ont qu'un seul choix : marcher avec ce système. En Chine c'est :

- Ou tu marches avec le système qui est en place, ou tu dégages. Si tu n'es pas content on trouvera quelqu'un d'autre, demain, pour prendre ton job.

On l'a dit, en Chine le système des retraites est pratiquement ... inexistant. Jadis un Chinois se disait "si je veux assurer mes vieux jours il faut que je fasse beaucoup de fils". Le pouvoir à stoppé cette solution en limitant sévèrement les naissances. Aujourd'hui l'idée est donc devenue : "si je veux assurer mes vieux jours, ma sécurité et celle de mes enfants il faut ... que je devienne riche, très vite".

Face à cela notre système de protection social français se transforme en ... handicap. La France n'offre plus d'avenir à ses enfants. Elle ne peut plus leur offrir qu'un avenir médiocre et incertain. Aujourd'hui en France les salaires permettent aux diplômés issus des classes moyennes... de payer un loyer mais plus de vivre correctement, de se dire qu'on a un avenir, qu'on pourra accéder à la propriété, etc. La "fracture sociale", selon le mot cher à Jacques Chirac s'élargit de jour en jour. Les "réformes" que nos "hommes politiques imaginent consistent à essayer de supprimer les uns après les autres les avantages sociaux, en les présentant comme des "avantages exorbitants".

Je me souviens de Chirac, juste avant le referendum sur la Constitution Européenne, faisant face à des jeunes, enfermés dans leur mutisme ( s'ils avaient ouvert la bouche , des journalistes encadrant ce face à face télévisuel soigneusement mis en scène leur auraient aussitôt dit qu'ils étaient "hors sujet" ), appelant à leur "esprit d'entreprise", à leur "courage vis à vis de l'avenir", lui qui vit dans un château, ne connait finalement rien du monde et n'a jamais fait autre chose dans sa vie que de la politique, c'est à dire ruser, parler et mentir, comme son prédesseur du reste.

Après la révolte des banlieues on assiste en ce moment à la révolte des classes moyennes, qui s'exprime à travers celle des diplômés ou futurs diplômés.

En fait, si des "mesures efficaces, réalistes et courageuses" devaient être prises cela consisterait à :

- supprimer le système des retraites et de l'aide sociale. Ainsi on pourrait alléger considérablement les charges des entreprises.
- permettre à celles-ci de licencier leurs travailleurs à n'importe quel moment, sans motif et non plus seulement pendant les deux années du "contrat de première embauche"
- vendre à l'encan le secteur public en le replaçant dans l'univers du libéral ce qui permettrait de se faire de l'argent frais en vendant les secteurs les plus jûteux au premier venu.
- permettre aux entreprises de fixer les salaires comme bon leur semblera en mettant les salariés en situation de concurence ( système déjà testé en Allemagne )
- mettre en place un puissant système coercitif avec une police politique, une mise en fiche des individus et peut être même un "puçage". Doter les forces de l'ordre d'armes "non-léthales".
- Introduire un suivi des individus dès leur âge le plus tendre, de manière à traiter au plus vite toute déviance possible.
- rétablir la peine de mort pour se débarrasser des irrécupérables
- construire d'immenses prisons et camps de concentration pour y reformater les récalcitrants
- ne pas ennuyer les gens qui s'enrichissent ou profitent des conditions de salaire et sociales ainsi laminées pour y amener leurs capitaux
- ne pas se préoccuper d'environnement, de pollution et de toutes sortes de sottises de ce genre.

En France des hommes politiques se partagent ces idées, par bribes, sans oser trop les mettre en avant pour ne pas trop choquer. Ils pensent que cela consiste à "faire preuve de réalisme".

Alors l'Europe pourrait peut être avoir une ( faible ) chance de faire jeu égal avec la Chine.

Le second point, également mis en lumière par Pomaglasky, qui l'appuie sur de nombreux chiffres, est le facteur temps. Il y a quelques semaines une enseignante française disait à ses élèves Chinois :

- Au train où vont les choses la Chine sera devenue la première puissance mondiale dans cinquante ans.

Un étudiant a levé la main et a répondu :

- Non, madame, dans vingt ans seulement.

Les Américains, les Russes, les Indiens savent cela. Les Européens ne sont pas capables de percevoir cette accélération iréversible qui dépasse simplement leurs capacités d'imagination. Même l'innovation, en Chine est menée à un train d'enfer. D'abord parce que les Chinois, par opposition aux Japonais, sont très bien dotés sur ce plan-là. Inutile d'envisager de les faire entrer dans le monde technique moderne : ce sont eux qui l'ont inventé et ils commencent simplement à s'en souvenir. Ensuite parce que dans les centres de recherche chinois c'est :

- Ou tu innoves, ou tu dégages. Il y en a trente dans la rue pour prendre ta place.

C'est une situation totalement impensable en France où nos instances de recherche continuent à être le siège de luttes intestines totalement anachroniques entre des gens médiocres, sans honneur ni éthique, qui occupent les postes-clés, disposent d'emplois à vie et luttent pour interdire l'accès aux postes de recherche aux gens réellement talenteux, alors que la France regorge de gens gens brillants et créatifs, "non-standards".

Certains disent "il faudrait suprimer le Cnrs et le remplacer par ceci ou cela...."

J'ai fait une carrière qu'on peut considérer comme un fantastique gâchis non-stop, un véritable exemple du genre, "multi-sujets". Mon dossier Cnrs, maintenant aux archives, serait là pour en témoigner. Mes idées les plus brillantes et les plus avancées ont même fait l'objet, comble du ridicule (des documents présents dans mon dossier en témoignent) d'une ... demande d'expertise psychiâtrique ( suggérer que l'on puisse évoluer à vitesse supersonique sans créer d'onde de choc, envisager une cosmologie à vitesse de la lumière variable revelant d'un déséquilibre mental : "is this man in normal mental condition ?" ). J'ai travaillé dans un nombre important de secteurs de recherche en obtenant des résultats concrets qui se situaient à chaque fois à la point de la discipline ( MHD : Annihilation de l'instabilité de Vélikhov, CAO, pédagogie, recherche théorique fondamentale ). Chaque tentative a été sanctionnée par un indispensable abandon, sous peine de graves problèmes de santé ( comme Benveniste, Bounias ). C'était :

- Abandonner la position ou y laisser sa peau.

Pendant 30 ans je n'ai pas eu un centime de crédits pour quoi que ce soit, et je suis loin d'être le seule dans ce cas. Je signale au passage qu'avant d'être contraint de me replier sur le papier-crayon j'ai été expérimentateur et que toutes les expériences que j'ai faites, qui avaient régulièrement vingt ans d'avance, ont toujours marché au premier essai. J'aurais pu diriger des dizaines de thèses de doctorat, former une armée de jeunes chercheurs. Je n'ai dirigé qu'une seule thèse, qui a débouché sur des résultats en pointe, originaux, du moins dans la sphère européenne. Ceux-ci ont donné lieu à des publications, à des communications dans des congrès internationaux, dans des pays où je n'ai pu me rendre faute d'argent ( Tsukuba, Japon, en 1987, Pékin 1991 ). La sanction en tombée en 1986 :

- Votre thésard ne trouvera de place dans aucun laboratoire d'Etat, parce qu'il a travaillé avec vous.

Message transmis verbalement ( par Bernard Fontaine qui je crois dirige actuellement le département Sciences Physiques pour l'Ingénieur, au Cnrs ), mais textuel.

Un message reçu cinq sur cinq. Le "blé en herbe" est allé prospérer ailleurs en fondant sa propre entreprise ( 20 salariés ), exploitant l'enseignement reçu. Thème des activités de l'entreprise ainsi créée : simulations numériques de phénomènes de combustion dans les moteurs.

Il n'y a pas eu de seconde direction de thèse.

Pendant 35 ans j'ai juste pu survivre et garder un salaire. Mais si le Cnrs n'avait pas existé, je n'aurais même pas pu mener cette carrière de chercheur théoricien privé de crédits, fonctionnant au "papier-crayon".

Nous avons en France une richesse immense : notre créativité. Hier, accroupi sur le quai d'une gare, je regardais de près le système de jonction des wagons du TGV et je mesurais la quantité d'astuce qu'on avait déployé pour créer cet assemblage révolutionnaire. Savez-vous que le TGV qui desservira l'est de la France roulera à 320 km/h. Savez vous que ce qui limite la vitesse de ces train n'est pas la tenue sur les rails mais les orscillations des conducteurs sur lesquels glissent les caténaires et que si on créait un système plus rigide ces trains pourraient attreindre 500 km/h ? Qui aurait imaginé de telles choses il y a vingt ans ? Quel Français visionnaire a inventé ce concept génial, permettant d'abaisser le centre de gravité des éléments du train, et de créer une grande rigidité de l'ensemble de la rame, ce qui permet au train d'atteindre de telles vitesses et qui a permis un jour à un TGV de sortir de ses rails à pleine vitesse sans se replier comme accordéon, en continuant à ... rouler sur le ballast ?

En France nous avons des légions "d'inventeurs de TGV". C'est notre incroyable richesse. Mais pour une chose réussie, combien de choses ratées ?

Je vais vous dire une chose. J'ai inventé un bateau à grande vitesse, capable de filer à 1000 km/h sur l'eau ( et même sur terre, sur des terrains plats ). Ces engins ne sont ni des avions, ni des bateaux, en fait, mais des structures à effet de sol dynamique, légères comme des avions mais vastes comme des navires. Quand un tel véhicule, que j'ai appelé "fishbird" croisera un navire sur sa route il ne l'évitera pas, il le sautera. Mesurant 300 mètres de long et 100 mètres de large de telles unités pourraient absorber les vagues les plus fortes, sur un océan. Un système lui permet de de pas être endommagé par une épave flottante.

Un fantasme, un rêve ? Un "délire technologique", selon l'impression employée un jour par un imbécile de journaliste aéronautique français ? Non, j'ai déjà essayé cette machine, en la dotant d'un propulseur fusée. Elle marche parfaitement et les vitesses atteintes par les maquettes sont spectaculaires. Le secret est un dessin assurant à cette machine une totale stabilité, lui évitant de se retourner ou de s'envoler. Elle file collée à la surface de la mer comme si elle cheminait sur un rail d'air.

Bien sûr, ces engins ont aussi des versions militaires redoutables. Un fishbird armé peut se muer en torpille bon marché filant au ras des flots comme un poisson volant. Une vedette à effet de sol dynamique ne peut être atteinte par une torpille, par collision, et peut aussi échapper à une explosion de proximité en prenant brusquement de l'altitude. Simple évocation. Ces aspects ne m'intéressent pas. Mais gare à la nation qui aura su se doter de ces armes complètement nouvelles (on verra dans le second papier de Pomagalsky que la Chine espère ravir aux Américains la maîtrise des mers ).

Je ne sais pas pourquoi je mets cela ici. Pourquoi pas ici plutôt qu'ailleurs ? De toute façon, quelle importance ? En France j'ai passé 35 ans à faire antichambre avec des projets auxquels personne n'a prété attention. Je me revois déjeunant avec Madelin, alors ministre de l'industrie, essayant de l'intéresser à un programme de CAO tournant sur un simple micro-ordinateur, le seul au monde à l'époque. Nous étions six "informaticiens de pointe". Nous avons récolté un discours. J'avais envie de dire :

- Ne pourriez-vous pas nous sortir autre chose que ce discours creux ? Vous n'êtes pas à la télévision mais devant des pros d'une technologie, qui arrivent avec du concret.

Peine perdue. A l'époque Thomson s'apprétait à sortir son TO7, avec 8 K de mémoire centrale. Voyant ce prototype, j'avais dit à ces gens :

- Mais avec ça, on ne peut pas fonctionner. Il est impossible d'héberger un langage de programmation. Pour vous, un micro-ordinateur est avant tout un jouet ( ce qu'on appelera plus tard une "console vidéo" ).
- Non, il y a des logements, derrière, où on peut loger des blocs de 16 K. Comme ça, si l'utilisateur le désire ....
- A 800 F l'unité ! Faites le calcul. Pour gonfler cette machine et lui donner les performances d'un Apple II il faudra dépenser le double du prix de cette machine. Et vous n'avez même pas de lecteur de disquette disponible dans les magasins ! Je vous propose de joindre à vos machines mon programme de CAO. Le fait que votre machine soit dotée d'un "crayon optique", saisissant les points sur l'écran ( mais qui était utilisé pour des jeux ! ) représente un plus actuellement sans équivalent sur le marché. Celui-ci pourrait démultiplier les capacités d'un logiciel de CAO, non pas pour des usages industriels, mais pour stimuler le goût des jeunes Français pour la technique, pour leur apprendre la géométrie, développer leur vision dans l'espace, leur créativité technicienne. Pour cela il me faudrait une machine et un lecteur de disquette et vous me suggérez de ... les acheter de mes propres deniers.

On sait ce qu'il advint de ce plan micro-informatique à la Française. Echecs du TO7, du TO9, du MO5, d'Alice, etc. Thomson casa de force des dizaines de milliers de machines dans l'éducation nationale où elles ne sont plus qu'un mauvais souvenir. Un nommé Jean-Jacques Servan-Schreiber se fit donner des millions pour créer un "Centre Mondial d'Informatique", bourré de sociologues, obnubilé par un "nouveau langage", le "logo" ( avec la "tortue", vous vous souvenez ? ). Une montagne qui accoucha d'une souris. Pendant que les véritables créateurs, les véritables visionnaires restaient dans le sou. Ma doué, quels mauvais souvenirs qui remontent. Comme ils sont nombreux, dans tant de domaines. Quel gâchis ! Un de plus....

Pourtant, en France, des cerveaux, nous en avions. Nos programmes étaient, avant la lettre "orientés objets", nous utilisions le système de la "mémoire virtuelle". Mon programme de CAO n'avait aucun équivalent dans le monde. Je suis même passé une fois à TF1 au début des années quatre-vingt en montrant une animation ( une séquence où on tournait autour d'un village et où "les parties cachées étaient éliminées" ). Les images, "précalculées" avec un Apple tournant avec une horloge de 2 mégahertz étaient stockées sur une disquette 5 pouces. On les balançait à l'écran avec une molette ( le "paddle" : la souris n'avais pas encore été inventée ). Cette disquette 5 pouces, stockant des séquences d'images était la préfiguration avant la lettre du ... vidéo-disque.

De quelque côté que je me tourne, dans ma carrière, je vois surgir des souvenirs nauséeux de ce genre. Quand on ne se heurte pas à une surdité imbécile on voit des gâchis illimités faire tache d'huile. Innover, en France c'est tenter de labourer dans un champ de cailloux, face à une indifférence générale. Il y a des milliers de Français qui vivent cela chaque jour. J'arrête, je vais me souvenir des gâchis de la Villette et de tant d'autres choses, faire monter ma tension. Je ne suis pas aigri, je suis consterné de voir que la France est une usine à gâcher les talents.

Savez-vous que les Chinois connaissent parfaitement l'existence de l'ENA, qui est pour eux un sujet de plaisanterie, une complète aberration. Toujours pragmatiques, ils disent :

- A quoi servent ces gens ? Que savent-ils faire au juste en dehors de sortir des phrases creuses et de faire perdre du temps ?

Le plus comique, je crois, est la façon qu'a eu notre pays de réagir à ce que j'ai appris aux gens en 2003 concernant la MHD, les avions hypersoniques, les torpilles hypervéloces ( lire OVNIS et armes secrètes Américaines ). On a créé en France un groupe "plasmas froids" qui équivaudrait, pour des gens qui découvriraient soudain de la biologie est une discipline intéressante, à constituer un groupe formé de bouchers et de charcutiers "parce que ces gens travaillent sur le vivant".

Les Chinois ont des équipes très actives, compétentes et imaginatives, travaillant sur la MHD, en conservant le secret maximal sur ces recherches à cause des applications militaires ( allez voir mon dossier sur les armes sismiques, par exemple, récemment mis en place. Ne serait-ce que cela ), dont nous avions découvert avec stupéfaction l'ampleur en 1982 à Boston. La Chine est le troisième pays au monde à être dans le course de la MHD avec les USA et la Russie. La France, même si elle se décidait à prendre le départ n'a que ... trente années de retard.

Faites attention à la Chine. Elle ne cherche pas à rattrapper les Occidentaux mais ne se gênera pas, si elle le peut, pour les dépasser dans tous les domaines, en innovant, en produisant des idées et des concepts très en avance sur l'époque, comme elle l'a fait trois mille ans plus tôt. Au plan des armements elle a des ambitions qui sortent des cadres conventionnels et cela depuis plus de trente années. Il existe des solution outsiders "post-nucléaires".

Au passage, les bandes dessinées d'Anselme Lanturlu seront peut être diffusées en Chine quand notre propre Ministère de l'Education Nationale ne se sera même pas encore aperçu de leur existence, ou accepté de s'en apercevoir.

Ci-après, le nom que m'ont donné les Chinois, en puisant dans leurs 47.000 idéogrammes disponibles.

Ca se prononce " Peuh " - " Thi " et cela veut dire :

Celui qui a beaucoup de connaissances et qui fait de la musique


 

Bon, maintenant lisez Pomaglasky. :

Dans ce grand dossier annoncé autour de la crise Iranienne, j’ai pris le parti de ne pas vous faire patienter jusqu’à la fin et de vous en révéler les lignes directrices dès maintenant. Car il est intéressant que vous soyez en mesure de vous représenter un tableau général de la situation avant de l’approfondir, sans avoir à patienter jusqu’au bout, au risque de vous lasser par cette avalanche d’informations.
La Chine est, à mes yeux, un des maillons essentiels de la crise qui se profile en Iran. Crise que je résume de la façon suivante :

RAPPEL : L’IRAN DETIENT LE DEUXIEME STOCK DE PETROLE AU MONDE

FACTEURS MAJEURS DECLENCHEURS DE LA PROCHAINE CONQUETE AMERICAINE DE L’IRAN :
- L’EMERGENCE DU FUTUR ENNEMI DES ETATS-UNIS: LA CHINE (LE MEILLEUR MOYEN POUR RALENTIR ET CONTROLER SA CROISSANCE EST DE TENIR LES ROBINETS DU PETROLE)
- L’ASSECHEMENT DES GISEMENTS DE PETROLE ET D’URANIUM (LE CONTROLE D’UNE ENERGIE RARE EST LA CLE DE LA DOMINATION MONDIALE)
- LA CRISE DU DOLLAR A VENIR ( SI WASHINGTON NE MET PAS LE HOLA A LA VOLONTE IRANIENNE D’OUVRIR UNE BOURSE DU PETROLE EN EUROS, L’AMERIQUE COURT VERS UNE CRISE FINANCIERE DE GRANDE INTENSITE)

FACTEURS MINEURS DECLENCHEURS DE LA PROCHAINE CONQUETE AMERICAINE DE L’IRAN :
- LA FIN DU PACTE AMERICANO-SAOUDIEN : PETROLE CONTRE PROTECTORAT, ET L’HOSTILITE CROISSANTE DE L’ARABIE SAOUDITE ENVERS WASHINGTON
- LE CONTROLE MOMENTANE DU POUVOIR PAR LES FAUCONS AUX ETATS-UNIS

PRETEXTES POUR ATTAQUER L’IRAN :
- LE DEVELOPPEMENT DE L’ARME NUCLEAIRE EN IRAN
- UN PAYS TERRORISTE (NUM 1 DE L’AXE DU MAL (*))

(*) Brève : On apprend le 17 mars 2006 qu’un document de la Maison Blanche définissant la stratégie pour la sécurité nationale place l’Iran en tête de liste des pays qui constituent une menace pour les intérêts américains dans le monde. Source : tous journaux.


L’émergence de la CHINE (1)

Le pétrole

Historiquement, la Chine n’a commencé à développer son industrie pétrolière que dans les années 1950, un début laborieux marqué par l’interdiction maoïste de s’appuyer sur des techniques d’entreprises occidentales. Avec l’aide de l’URSS, puis ensuite de l’Occident, les explorations ont permis d’estimer les réserves chinoises à 1,7% des réserves mondiales. Les succès rencontrés dans le développement du champ de Daquing à partir de 1963 intensifièrent l’exploration pétrolière, offshore et gazière. La production chinoise a augmenté progressivement jusque dans les années 1980 faisant alors du pays un exportateur net en 1985 avec 6,21 millions de tonnes exportées.

La croissance récente a fait exploser la demande intérieure et les importations. La croissance de la production industrielle, la vigueur des investissements étrangers et la hausse continuelle du niveau de vie ont dopé la demande énergétique dans l’industrie et les transports. Or la croissance de sa production nationale et ses réserves étaient nettement insuffisantes pour répondre à la demande domestique. Depuis 1993, la Chine est ainsi redevenue un importateur net de pétrole.

D’après la modélisation de la production prévisionnelle chinoise élaborée par le Uppsala Hydrocarbon Depletion Group, la Chine aurait dépassé son pic de production l’année dernière et son taux de diminution serait de 3,7% par an. Avec l’explosion de sa demande domestique et industrielle interne, la Chine est un des facteurs essentiels de l’augmentation de la consommation à venir du pétrole et de son prix.

« Depuis deux ans, la Chine assoiffée d’énergie, rachète à tout va sur les cinq continents des entreprises produisant du pétrole, du gaz ou de l’électricité », peut-on lire dans les pages économiques du Figaro en juillet 2005. Actuellement en troisième position avec 6% de la consommation mondiale, derrière le Japon, certains analystes voient d'ici un an la Chine devenir le plus grand importateur de pétrole au monde derrière les Etats-Unis. La part du pétrole dans la consommation énergétique chinoise de l’ordre de 25%, devrait passer à 30% en 2015.

Les livraisons d’armes ont permis aux chinois de négocier l’obtention de concessions auprès de pays producteurs. L’Irak, l’Iran, l’Angola et le Nigeria ont accepté cet échange. Ces dernières années, la Chine s’est ainsi engagée clairement aux côtés des régimes du Soudan et de l’Angola, qu’elle soutient dans leur lutte contre des guérillas ou des voisins.
Le Venezuela, qui possède les plus grandes réserves prouvées de pétrole de l'hémisphère Ouest, commence à faciliter à la Chine l'accès à ses possessions. Le président Hugo Chavez a annoncé lors de sa visite en Chine en décembre 2004 que ses hôtes investiraient lourdement dans le secteur pétrolier vénézuélien, une démarche qui pourrait à terme affecter les Etats-Unis, qui sont actuellement les plus gros consommateurs de pétrole vénézuélien avec des imports qui se montent à 15 % de sa production annuelle de pétrole brut. Chavez a également ajouté que le commerce bilatéral avec la Chine devrait atteindre 3 milliards de dollars en 2005, plus du double des chiffres de 2004. En outre, un des plus importants accords entre la Chine et son alliée socialiste, Cuba, a trait au pétrole. SINOPEC, une compagnie pétrolière chinoise - une des plus grandes au monde - a annoncé qu'elle commencera à chercher des champs pétrolifères au large des côtes cubaines.

D’importantes conséquences seront à attendre sur l’équilibre géopolitique de l’Asie, de cette présence accrue de la Chine, qu’il s’agisse de la sécurité de ses voies d’approvisionnement, des revendications territoriales en mer de Chine, du positionnement chinois croissant au Moyen Orient, y compris militairement, ou de rivalités avec la Russie pour le contrôle des champs de pétroliers et gaziers d’Asie centrale. La nécessité de se préparer à une forte hausse des importations est au cœur d’une réorientation offensive de la politique étrangère chinoise (le dragon gourmand) tous azimuts.

L’ambition

La Chine va-t-elle devenir la puissance dominante de l’Asie ? Le professeur Ludovic Woets, consultant en défense, en géostratégie et intelligence stratégique auprès du ministère français de la défense écrit :

- Sera-t-elle tentée par des visées expansionnistes de type impérial ? L’un des scénarios dérivés, fortement repris à nouveau par les experts américains, serait la conséquence d’une Russie vide, constituant une proie aisée à un expansionnisme chinois, notamment en terme de population. Le Chinois craint le vide. Le vide et le chaos. Le vide car entraînant le chaos. Le chaos car étant toujours accompagné pour la Chine de grands malheurs. Le comportement de la population chinoise est donc prévisible que dans les circonstances où le pouvoir est fort. En très large partie, l’avenir de la Chine dépendra du degré de cohésion de l’Etat.(…). L’important n’est pas le contrôle économique, mais le contrôle politique et moral.(…) La Chine estime avoir souffert de l’Occident (la Chine reste aujourd’hui un pays blessé dans son orgueil), et ne veut pas se voir imposer un modèle occidental, y compris au sein des relations internationales. Pour les Chinois, la situation actuelle n’est qu’un incident de l’histoire (à son apogée en l’an 88 de notre ère, la Chine contrôlait l’un des plus vastes empires que le monde ait connu). La Chine parviendra à corriger cette situation et à retrouver sa centralité (…). La Chine entend bien profiter de la situation stratégique mondiale pour renforcer ses propres positions, notamment afin d’assurer l’accès aux régions pétrolifères de l’Asie centrale. Pour Valérie Niquet : « les stratèges chinois semblent ainsi raisonner, au risque de tous les dérapages, en terme d’urgence et d’occasions à saisir ». (…) Le renforcement national auquel nous assistons en Asie pourrait nous conduire à l’apparition de guerres. Le développement de leurs composants nationaux, de leurs structurations nationales dans le temps et dans l’espace, peuvent tout autant aboutir à un développement harmonieux, ou aboutir à l’image de l’Europe au XIX ème et XX ème siècle, à des conflits violents. Nous devrions assister à terme à des conflits indirects en Asie, où nombre de pays (Inde et Chine notamment) ont des intérêts fortement concurrents.(…). La croissance a fragilisé l’unité du pays. La Chine de l’intérieur est aujourd’hui à l’écart de l’expansion économique. La Chine fonctionne donc aujourd’hui à plusieurs vitesses, fragilisation qui s’ajoute à la fracture entre les classes urbaines et les masses paysannes rurales, toujours démunies. Il convient d’ajouter à tout cela des incertitudes quant aux dissidences du Tibet et du Xinjiang. (…). La Chine se tourne aujourd’hui vers la mer. Elle a obtenu durant la dernière décennie du XX ème siècle un accès permanent sur la mer du Japon (Pacifique nord) et un accès à l’Océan Indien par la Birmanie. La Chine revendique une marine de haute mer, reprenant un concept ancien : la puissance mondiale ou la déchéance.(…) la mer de Chine est définie comme « sheng kong jian », c'est-à-dire « notre espace vital ». Les Etats-Unis sont aujourd’hui la seule puissance globale maritime. Et elle entend bien le rester, comme rester la puissance centrale du monde. Or, aujourd’hui, la Chine vise à détrôner les Etats-Unis de cette centralité, afin de retrouver la sienne, millénaire, historique, l’empire du milieu.(…)

La Chine connaît actuellement une croissance économique exceptionnelle engendrant des turbulences internes. Elle doit gérer cette nouvelle richesse et maintenir sa croissance tout en réduisant la pauvreté et les inégalités qui deviendraient, si rien n’était fait, des sources de déstabilisation.

Le pays est confronté à plusieurs problèmes majeurs, parmi ceux-ci : l’alimentation de sa population. L’empire doit nourrir 21% de la population mondiale avec 7% des terres cultivables dans le monde. De plus, cette population, d’ici 2030, devrait encore augmenter, de l’ordre de 350 millions d’habitants, alors même que la surface agricole cultivée diminue. A cette date, la Chine devra nourrir 1,6 milliards de ren-kou : bouches à nourrir. La difficile gestion de l’alimentation passe par la tout aussi difficile question de l’eau. La culture du riz est très gourmande en eau - il faut 4500 litres d’eau pour produire 1 kg de riz - et toutes les dynasties qui se sont succédées ont eu à cœur de garantir aux campagnes un vaste système d’irrigation centralisé. De nos jours, le problème est devenu presque insoluble. La Chine ne reçoit que 7% des précipitations pour 21% de la population mondiale et ses besoins liés à l’industrialisation sont en augmentation rapide. Un tiers de son territoire est aride ou semi aride et plus d’un quart en cours de désertification. L’eau est donc devenue un enjeu majeur. C’est d’autant plus vrai que les ressources mondiales seront, au cours des prochaines années, à l’origine de tractations et de tensions internationales au moins aussi exacerbées que celles dues au pétrole, les besoins de la planète devraient atteindre 7000 milliards de mètres cubes par an en 2015, soit deux fois et demi la consommation de 1980. La Chine qui compte plus de 20000 usines chimiques, voit ses eaux se polluer dramatiquement. Le dernier accident en date, la décharge de 100 tonnes de benzène toxique dans un affluent de l’Amour le 13 novembre 2005, n’est qu’un parmi tant d’autres moins spectaculaires. Six catastrophes de même nature ont été dénombrées en seulement quatre mois, dont une pollution au cadmium qui a touché les rizières dans le Guangdong et menacé la distribution d’eau au nord de Canton. Près des grandes villes, 50% des nappes phréatiques sont gravement polluées, l’eau du robinet est imbuvable. 300 millions de chinois boivent de l’eau impropre, sévèrement contaminée. Or l’objectif de croissance à tout prix reste numéro un. Le numéro deux chinois Wen Jiabao a déclaré le 16 mars 2006, à propos du débat sur la croissance, qu’ « il faut pousser en avant sans faiblir (…) De nouvelles difficultés surgiront, mais nous ne pouvons pas nous arrêter en chemin ».

La rapide croissance chinoise a un grand impact sur la consommation énergétique mondiale. La Chine se transforme rapidement en l’un des plus grands importateurs mondiaux de pétrole et de gaz. Le rapport World Energy Outlook 2004 de l’Agence internationale de l’Energie prévoit qu’entre maintenant et 2030, la demande énergétique mondiale augmentera d’environ 60 %, la Chine et l’Inde représentant quasiment les deux tiers de cet accroissement.

Le rapport de l’économiste chinois Wang Jian, membre de la Société de macroéconomie de Chine, est explicite sur ce sujet et trouve une solution qui est à méditer :

- Si l’on considère qu’en 2030 la Chine comptera 1,6 milliard d’individus (…), elle utilisera chaque année plus de 300 millions de tonnes d’acier et sa consommation en minerai de fer dépassera les 600 millions de tonnes, soit davantage que les quantités disponibles actuellement sur le marché mondial. La situation est encore plus grave en ce qui concerne le pétrole et les céréales (...). La consommation de pétrole par habitant dépasse 1 tonne dans les pays industrialisés. Si la Chine, avec ses 1,6 milliards d’habitants, rejoignait leurs rangs, il lui faudrait donc 1,6 milliard de tonnes de pétrole, mais elle ne peut espérer produire elle-même au mieux que 200 millions de tonnes, en raison de ressources limitées. Autrement dit, il lui faudra importer 1,4 milliard de tonnes de pétrole, soit plus de 60 % des ressources disponibles. Pour les autres pays, il restera à peine 900 millions de tonnes, alors qu’aujourd’hui les importations pétrolières des Etats-Unis, du Japon et des pays européens dépassent déjà les 1,2 milliards de tonnes. La Chine pourra-t-elle vraiment obtenir de quoi satisfaire ses besoins ? (…). Aussi la Chine doit-elle d’ores et déjà élaborer une parade aux possibles soubresauts qui risquent de secouer l’économie mondiale. Le développement pacifique du monde a un avenir limité. (…). Le développement pacifique du monde n’a donc peut-être que cinq ans devant lui. C’est pourquoi nous ne pouvons pas considérer que (…) une fois les ajustements économiques effectués il sera encore possible de se développer dans un environnement mondial paisible et de se procurer pacifiquement comme auparavant les matières premières nécessaires sur le marché mondial.


Se procurer pacifiquement les matières premières n’étant, à terme, plus possible selon les experts, la Chine entreprend de s’armer à toute allure. Elle s’y attelle avec la construction de six sous marins nucléaires d’attaque de type Han (voir article joint sur la flotte sous marine), avec l’aide de la Russie, et avec le projet de construction de quatre porte avions et de nombreux navires d’accompagnement. « Il est notoire que la Chine développe en qualité et en quantité son arsenal nucléaire stratégique » affirme l’amiral Marcel Duval dans la revue Défense Nationale. Leur fusée Longue-Marche a été d'emblée dimensionnée pour disposer d'une portée de 12.000 kilomètres, soi-disant pour envisager une reprise de la conquête lunaire. En fait c'est très exactement la distance qui sépare la Chine des Etats-Unis. Les moyens de projection des forces aériennes, navales et de missiles de l’armée populaire de libération chinoise au dessus de Taïwan se sont rapidement accrus au cours des dix dernières années. Cet effort a été réalisé à la fois sur la base d’un accroissement du budget de la défense (12 à 13% d’augmentation par an depuis 1989), d’une modernisation soutenue des équipements et de l’acquisition auprès de la Russie, et dans une moindre mesure d’Israël, de systèmes de défense modernes : avions de combat Su-27 et Su-30, sous marin Kilo, destroyers Sovreminny équipés de missiles supersoniques Sunburn, batteries de défense anti-aériennes, etc. Par ailleurs l’armée peut compter sur 7200 chars, 4560 blindés d’autres types, 3400 avions et 480 hélicoptères. Cet effort a été facilité, c’est un euphémisme, par des dépenses militaires réelles que les experts estiment à trois fois plus importantes que le budget officiel, c'est-à-dire à 100 milliards de dollars en 2005. Cette montée en puissance de l’armée chinoise a modifié l’équilibre des forces en extrême orient. En passe d’inverser l’équilibre bilatéral des forces dans le détroit de Formose au début de la prochaine décennie, l’armée populaire a, depuis la crise des missiles qu’elle y a déclenchée en 1995-1996, incité les Etats-Unis et le Japon a resserrer leurs liens stratégiques. Cette course à l’armement inquiète également les autres voisins de la Chine, au premier chef les pays de l’ANSEA et la Corée du sud.

En 2003, le ministre de la défense chinois, Chi Haotian, et vice-président de la commission militaire centrale, a publié un discours choc sous le titre « la guerre est proche ». Dans son discours, ce fonctionnaire de très haut rang soutient calmement la nécessité d’une guerre nucléaire qui détruirait le Japon et paralyserait les Etats-Unis. Voici quelques extraits de ce discours :

- La Chine a besoin d’importer du pétrole pour son développement économique et d’importer des matières premières telles que le bois de construction afin de protéger son environnement de la déforestation. Ceci est très raisonnable. Cependant, les grandes puissances ont leurs propres raisons et un pays tel que la Chine aura besoin de consommer 100 millions de tonnes de pétrole en 2010 et 200 millions de tonnes en 2020. Les grandes puissances tolèreront-elles cela ? La source de la plupart des guerres au cours de l’histoire a été la lutte pour les ressources vitales de base, y compris les terres et les mers. Le sujet du conflit va changer dans l’ère de l’information actuelle, mais sa nature restera la même. (…) La Chine a besoin d’être prête pour la guerre. (…) Les vingt ans de politique de développement pacifique touchent à leur fin. L’environnement international a subi un changement fondamental : les grandes puissances ont déjà planifié, une fois de plus, d’arrêter le progrès de la Chine vers la modernisation. (…) Les Etats-Unis et le Japon sont déterminés à priver la Chine de son droit au développement. (…) Nous devons donc considérer une guerre des détroits de Taïwan comme une bataille stratégique décisive. (…) nous allons devoir détruire totalement le Japon et mettre les Etats-Unis hors de combat, et ceci ne peut être obtenu que par une guerre nucléaire.

La menace est claire.


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