Le "choix" de l'Angleterre
21 octobre 2013
L'Angleterre vient de faire son choix, en optant pour la construction, sur son sol, de deux réacteurs EPR.
J'ai rajouté les guillemets le 25 octobre. En effet un article, mis en ligne sur Agoravox, apporte un éclairage différent sur ce "choix" anglais de"décider" de construire deux EPR sur son sol. Je renvoie donc le lecteur à ce papier.
http://www.agoravox.fr/actualites/societe/article/accord-nucleaire-londres-edf-les-142527
On y trouve des précisions bonne à savoir. Je cite ;
En réalité, comme personne ne veut d'EPR, EDF a carrément racheté au prix fort (15 milliards) British energy, renommé EDF energy, pour que celui-ci commande des EPR. Ce sont donc finalement les Français qui vendent des EPR à des Français, grâce à l'argent d'EDF. La ficelle est grossière. et ruineuse. |
Je reviens à ce que j'avais écrit avant que ces précisions me soient fournies :
Pourtant s'il y avait un pays qui pouvait s'orienter vers d'autres options, c'est bien celui-là. Je me distrais un court moment de la rédaction ardue de travaux de cosmologie pour évoquer cette question..
Les ressources en énergies renouvelables sont indiquées sur la figure ci-après :
On voit que dans le sud se trouvent d'abondantes ressources en solaire et, sur la côte marocaine, en éolien, où les vents soufflent avec une grand régularité. D'où le projet DESERTEC. Sur le papier c'est magnifique, mais au plan politique, bonjour, quand on connaît la versatilité des pouvoirs politiques dans les pays arabes. Les Allemands s'imaginent peut être qu'après que des sommes importantes aient été dépensées pour équiper ces régions, les pays concernés vont exporter à bas prix cette précieuse électricité vers les grands frères européens. Si oui, ils se mettent le doigt dans l'oeil jusqu'à l'épaule. Après le choc pétrolier, le "choc électrique".
22 octobre 2013 : Lire cette information toute récente. Les pays Arabes envisagent de récupèrer à leur profit ce projet DESERTEC ( à juste titre, c'est chez eux ). Coût évalué d'un tel projet : 400 milliards d'euros.
Il suffirait que les pays arabes riches mettent la main au porte-monnaie. Ils ont largement les moyens de financer une telle entreprise, au lieu de consacrer des milliards à acheter de l'immobilier à Londres ou Paris, ou de construire des pistes de ski climatisées, comme à Dubaï. Regardez tous les points jaunes sur cette carte. Là pourrait se situer le futur eldorado énergétique. Mais cette manne serait prioritairement consacrée au développement des pays concernés. L'électricité peut être affectée au dessalement de l'eau de mer, donc à la valorisation des déserts de l'arrière pays. En cultivant des tomates à l'abri des panneaux solaires dotés de lentilles de Fresnel, les Emirats pourraient devenir de gros exportateurs de légumes frais.
Vous devez savoir que toute l'eau douce utilisée aux Emirats Arabe Unis est produite dans une usine cotière de dessalement alimentée en pétrole, y compris l'eau d'irrigation des gazons bordant les autoroutes, par diffusion sous-jacente.
Mais son rêve, c'était d'voir pousser l'gazon...
Ces pays ont urgemment besoin de se développer, subissant le poids d'une forte poussée démographique. Les Occidentaux, avec leurs conforts douillets, se verraient alors concéder cette électricité au compte-goutte, en échange de larges concessions politiques (concernant l'immigration, l'extension de leur hégémonie coranique). Affaire à suivre.
Ces pays arabes arriveront-ils à s'entendre, pour une fois ? Tout est là. Lawrence d'Arabie, en son temps, avait fait les frais de leurs dissensions tribales. Ces pays ont de nombreuses fois trouvé une entente contre Israël, seul capable de fédérer leurs énergies. Des ententes enthousiastes, mais qui se sont à chaque fois soldées par des déculottées retentissantes.
Là, l'enjeu, ici, est d'une autre envergure.
Ceci étant, ces ressources sont illimitées. Rien qu'en équipant tout le littoral du Maroc en éolien on shore il y aurait de quoi alimenter une bonne partie de l'Europe en électricité; avec la constances remarquable du vent marin. Avec nos EPR nous sommes vraiment les couillons de l'histoire. Mais les indépendances nationales passent avant tout, même si ce sont de véritables suicides mode d'emploi. Vous connaissez le proverbe anglais :
Right or wrong, my country
( " Qu'il ait raison ou tort, avant tout, c'est mon pays " )
On pourrait paraphraser en proposant :
Stupid or not, my country
( " Que ses choix sont intelligents ou stupides, avant tout, c'est mon pays " )
Parenthèse ; on remarquera au passage que les USA jouissent d'une situation assez exceptionnelle. Ils disposent, sur leur territoire, de vastes étendues, ( les Rocheuses et leurs régions désertiques ) se prêtant à un développement massif du solaire, et de l'éolien. Mais, pour les USA, le pétrole représente l'énergie la moins chère, et un outil de géopolitique majeur.
Les Anglais, par contre, sont dans une situation a priori privilégiée. Ils disposent d'abord de ressources en éolien et en hydrolien (dans ce dernier domaine, les ressources potentielles représentent 13 à 23 Térawatts x heure. (voir à ce sujet cet intéressant document, montrant la variété des formules possibles ), mais qui ne serait nullement à même de couvrir leurs besoins. Par contre ils sont à 1300 km de l'Islande, laquelle pourrait devenir, modulo des investissement ad hoc, l'Arabie Saoudite de l'éolien et du géothermique.
L'exploitation de l'énergie géothermique n'est pas sans risque.Le prélèvement d'une telle énergie dans le sous-sol ( et elle est présente dans de nombreuses régions) s'accompagnent de micro-séismes de mauvais augure. Ce phénomène a ainsi amené l'arrêt d'une telle exploitation près de Bâle, qui avait été victime d'un fort séisme en 1356.
Le séisme de Bâle, 1356
En se référant à cet événement les Suisses se dirent que l'exploitation de la géothermie n'était pas sans risques et cessèrent leurs travaux. Par contre ça serait moins conséquent en Islande, qui est une île très peu peuplée. L'essentiel de la population se concentre à Reikjavik, à l'ouest. L'île est barrée, du sud ouest au nord par une faille, qui est le prolongement émergé de la dorsale médio-océanique.
La situation de l'Islande semble fort différente.
Les émergences de basalte théolithiques, en marron, sont la trace de la dorsale médio-océanique. Rejkiavik, au fond d'une petite baie, est à l'ouest de cette ligne de fracture. Les deux moitiés de l'île continuent d'ailleurs de s'éloigner l'une de l'autre, et on montre aux touristes ces endroits où cet éloignement est mesurable. Il me semble que des exploitations d'énergie géothermique à grande échelle, à l'est de cette faille, ne représenteraient pas de risques pour les populations, très concentrée dans la capitale.
Cette carte me rappelle le souvenir d'une visite dirigée par les époux Kraft, mort dans l'écoulement d'une nuée ardente au Japon en 1991. En Islande certains geysers ne fonctionnent plus, simplement parce que la température au fond n'est pas suffisante pour déclencher l'ébullition. Ils m'avait montré comme ranimer les geysers, avec du produit vaisselle. Il suffit d'en vider une bouteille par l'orifice supérieur. Quand le produit arrive en profondeur il abaisse la température d'ébullition de l'eau et le geyser se ranime, une unique fois. Il projette alors en l'air des centaines de milliers de ... bulles de savon.
Au sud de l'île d'Heimaey, dominée par le volcan Heldfell. Jusqu'en janvier 1973 celui-ci était considéré comme le prototype du volcan éteint, comme le rappelait la veille, en cours, le tenant de la chaîne de volcanologie d'Islande (authentique). Mais le 22 janvier il se réveille, et ensevelit la moitié de la ville.
L'île d'Heimaey, partiellement recouvert par les cendres volcaniques.
Peu de temps après j'ai eu l'occasion de visiter cette région. Au sud ouest se trouve l'île de Surtsey, qui résulta de l'émergence d'un volcan sous-marin, de 1963 à 1967. Ce sont les géologues qui lui donnèrent le nom d'un géant de la mythologie nordique.
Quelques années plus tard un nouveau volcan sous-marin se manifesta et un île fumante apparut à la surface. Cette fois le gouvernement islandais décida que ça n'était pas aux vulcanologues de donner des noms aux îles. Cette décision devait s'accompagner de quelque geste politique. On organisa alors la visite de la reine du Danemark, accompagné d'un de ses descendants. Le gouvernement islandais envisageait de donner à cette idée le nom de cette progéniture. Les préparatifs allaient bon train et les discours étaient déjà préparés quand une nuit, sans crier gare, l'île ... disparut.
Message d'un lecteur : Bonsoir, A propos de l'article sur les énergies, voici un retour d'expériences dont m'ont parlé des exploitants de ces centrales, aux Philippines, avec qui j'en ai discuté. Personnellement, j'ai travaillé avec eux sur des domaines moins révolutionnaires. (installations de l'ile de LEYTE). L'île compte deux millions d'habitants. Au départ, c'est assez enthousiasmant, car on injecte de l'eau pressurisée dans le volcan, et on récupère de la vapeur. Plus on en injecte et plus on en récupère... jusqu'à un seuil de débit (variable) où l'on récupère beaucoup de vapeur pour la turbine, et puis, soudain, on ne contrôle plus rien. La terre se met à trembler dangereusement!!! Il y a de nombreux paramètres non maitrisés en géologie qui rendent cette technique très délicate. Cordialement, Luc BARANGER |
Revenant aux possibilités de géothermie et d'éolien de l'Islande, rappelons que le transport de puissance électrique en continu haute tension s'impose, dès que les distances (y compris terrestres) dépassent 1000 km. Ce courant continu est alors acheminé par un unique conducteur sous très forte tension (jusqu'à 800.000 volts). Actuellement, dans le monde il existe 142 installations de ce genre, véhiculant 100.000 mégawatts. C'est de cette façon que les Français expédient, et vendent 5000 MW aux anglais, via une ligne de 70 km de long traversant la manche.
Les Canadiens utilisent aussi ce mode de transport pour acheminer vers leurs villes de courant produit par Hydro-Québec, dans le nord (installations hydroélectriques, faibles hauteur de chute, mais débit immense). Le courant est créé par des alternateurs, la tension est élevée par des transfos, puis redressée. A l'arrivée, processus inverse avec onduleurs et des cascades de transformateurs.
Unité de redresseurs canadienne
Mais les Anglais ont préféré commencer à se rééquiper avec les réacteurs EPR, fonctionnant 100% au Mox, c'est à dire au plutonium, ce qui fait qu'un accident sur de tels réacteurs aura des conséquences .. impensable. Le motif d'une telle décision est double. Il y a d'abord la pression des lobbies du nucléaire, aussi bien français qu'anglais. Ajoutons que le troisième partenaire est la Chine, ce qui prête à inquiétude. En effet selon ma femme, qui est Chinoise il ne passe pas de jours, en Chine, où un pont mal construit ne s'effondre pas. Et si, en plus, c'est pour l'étranger ..
L'autre raison est cette obsession de l'indépendance :
Même préoccupation en France, sous la houlette de nos deux nucléo-députés, le député du Nord Christian Bataille et le sénateur de la Haute Marne Bruno Sido. C'est dans son département qu'est implanté le projet d'enfouissement profond CIGEO, de l'ANDRA, à Bures. Bataille et Sido nous concoctnt un plan d'indépendance énergétique pour les 5000 ans à venir, avec déploiement de surgénérateurs à neutrons rapides, refroidis au sodium, dont ASTRID (600 MW) est le précurseur. Lisez cet article, rédigé pour l'Appel de Genêve II , vous n'en croirez pas vos yeux.
Des vieillards brossent l'avenir du nucléaire français pour les 100 ( et même 150 ) années à venir.
ASTRID, le surgénérateur qui renaît de ses cendres
La courbe représentant une "trajectoire raisonnée, jusqu'en ... 2100, qui figure à la fin de cet article, n'est pas issue du rêve d'un fou (ou de deux), mais extraite de ce rapport, rédigé par cette commission de l'Assemblée Nationale sur l'Avenir du Nucléaire français.
Dans cette nef des fous qu'est le nucléaire français, n'oublions pas le projet de réemploi de la technologie des réacteurs nucléaires des sous-marins, développée à Cadarache, le projet Flexblue :
Une image d'artiste montrant un réacteur immergeable Flexblue, acheminé vers une zone côtière.
Le même, immergé :
Le grillage est là pour empêche le passage des algues et des méduse, susceptible
d'obstruer les orifices de pompage, pour le refroidissement du réacteur
Il n'y a pas (encore) de projet d'implantation de telles installations autour des côtes françaises, mais je sais de source sûre que le CEA (qui ne s'en vante pas) a négocié avec un pays étranger l'implantation de ce superbe produit à l'exportation.
A Fukushima les Japonais pompent toujours, tels des nucléo-shaddock :
Employés de TEPCO
Un typhon a fait déborder les réservoirs dans lesquels est stockée l'eau contaminée, qui a ruisselé dans le site et s'est écoulée dans le Pacifique. Le compte à rebours est commencé, vis à vis de l'opération de récupération des 1300 barres de combustibles usagé qui sont dans la piscine du réacteur numéro quatre.
25 octobre : Un séisme de magnitude 7,3 s'est produit hier, pratiquement avec le même épicentre que celui de 2011.
Le site nucléaire de Fukushima a été évacué.
Le séisme de 2011 avait comme magnitude 9, mais cet événement d'hier est là pour nous rappeler la sismicité chronique de la région. Que l'épicentre d'un tel séisme se situe, non à 200 km en mer, mais dans dans le site même de Fukushima, celui-ci pourrait entraîner l'effondrement de la piscine du réacteur n°4 qui, on le sait, a été considérablement fragilisée, et dont l'assèchement brutal pourrait provoquer une catastrophe d'ampleur internationale. Ceci me rappelle le thème de la conférence donnée par un représentant de Cadarache en juin dernier, à l'Ecole des Arts et Métiers d'Aix en Provence et dont le thème était "Après que la situation ait été normalisée à Fukushima, le point sur le redémarrage de la collaboration franco-nipponne en matière de nucléaire ".
Retour en France. Consultez les deux pages Internet sur le site de Tricastin :
AREVA : Le site de Tricastin : un site industriel unique en Europe
WIKIPEDIA : Le site de Tricastin
Dans le second vous trouverez, au vaste chapitre intitulé Pollution et incidents (dernier en date : 2013, explosion d'un isolateur )
Assemblages bloqués de septembre 2008 Le 8 septembre 2008, 2 assemblages sont restés accrochés aux structures internes supérieures au cours d’une opération de renouvellement du combustible nucléaire. Dès le constat fait de l'anomalie, l’opération a été immédiatement arrêtée. Les 2 assemblages restaient suspendus sous l’eau dans la cuve, tandis que l’exploitant faisait procéder à l’évacuation du bâtiment réacteur et à son isolement. Les assemblages sont restés bloqués plus d'un mois. EDF a proposé des solutions techniques le 14 octobre pour récupérer les deux assemblages. L'Autorité de sûreté nucléaire les a évaluées sur la "maquette" du centre d'expérimentation et de validation des techniques d'intervention sur chaudières nucléaires à eau pressurisée (CETIC) de Chalon-sur-Saône. Le 22 octobre, l'ASN a donné son aval à l’opération. Il n' y a eu aucun risque dû à la criticité, ni au défaut de réfrigération des assemblages, lors de cet incident. Un incident de même type s'est déjà produit en France sur un assemblage en 1999, à la centrale nucléaire de Nogent (Aube) qui a aussi été soldé sans problème particulier. Toutefois la situation à Tricastin était différente avec 2 assemblages contigus suspendus, au lieu d’un seul en 1999. |
Mais, dans la nuit du 24 au 25 octobre 2013 ( hier, au moment où j'écris ces lignes) un des réacteurs de Tricastin, insuffisamment refroidi du fait de l'état du fluide parvenant aux pompes (un limon visqueux, mélange d'eau et de sédiments), s'est placé automatiquement en arrêt d'urgence. C'est à dire que les barres de contrôle sont tombées automatiquement, tandis qu'un lâché de valeur du circuit secondaire, lui aussi insuffisamment refroidi, était automatiquement déclenché. Voir l'article et la photo ci-après :
A comparer avec la présentation du site, résolument optimiste, faite par AREVA, déjà citée :
Le site de Tricastin : un site industriel unique en Europe
Nuit du 24 au 25 octibre 2013 : lâché en catastrophe, automatique, de vapeur du circuit secondaire, dont le refroidissement n'est plus assuré
Tout est pour le mieux dans le meilleur des nucléaires possibles.
A Fushima il y a 1300 éléments à extraire, à 30 mètres de hauteur.
Pour revoir l'histoire de Fukushima telle que je j'avais suivie pour vous en 2011