Août 2005

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L'histoire de la Palestine s'identifie avec celle du peuple juif, quand on se projette des millénaires en arrière. Cette histoire s'appelle l'Ancien Testament. Beaucoup de choses sont susceptibles de s'éclaircir si on connait ce document, un peu volumineux. Deux mille cinq cent pages, sauf erreur, en version poche, bon marché, en deux tomes. Il existe une version judéo-chrétienne et une version abrégée, représentée par des fragments du Coran. Il y a quelques différences entre les deux. Nous laisserons aux lecteurs des deux documents le soin de les découvrir. Il y a plus de dix ans j'avais entrepris un travail personnel sur la Bible, Ancien et Nouveau testament compris. Le point de départ avait été une émission de télévision à laquelle j'avais assistée et où des religieux s'étaient vigoureusement affrontés, précisément à propos de la Palestine. Je n'avais pas très bien capté leurs arguments respectifs, mais une chose m'était restée. Ces hommes s'étaient quittés, chacun s'écriant "tout est dans Le Livre ! ". De quel livre, ou de quels livres ces gens parlaient-ils ? J'ai tenu à me renseigner. J'ai essayé de rendre cette Bible lisible, en utilisant la technique de la bande dessinée, à travers la façon dont j'avais perçu ces textes, bien sûr. Mais, très vite, je me suis aperçu qu'une bonne chose consistait à reproduire in extenso des extraits de textes, le plus souvent dans les "bulles", avec les références. Cette bande-dessinée-fleuve peut être lue en tenant dans l'autre main le document de base, le véritable texte biblique ou du moins une de ses traductions (mais elles diffèrent en fait assez peu les unes des autres). Je me rappelle qu'à l'époque j'avais eu des heurts avec des juifs pratiquants et cela avait été pour moi l'occasion de m'apercevoir qu'ils connaissaient fort mal leurs "textes de base". Même choses pour des catholiques ou des protestants. Après avoir été accueilli à bras ouverts par les moines du couvent Saint Jean de Malte d'Aix, tant qu'il s'était agi de l'Ancien Testament, je me suis fait accueillir plutôt fraîchement dès que j'ai exhumé certains passages des Actes et Epîtres (totalement inconnus de la plupart des chrétiens). J'ai entendu par la suite un pasteur lire à la télévision un psaume. A mon grand étonnement, il sautait des versets. Quand je l'ai eu au téléphone il m'a dit avec beaucoup de naturel "mais on n'est pas obligé de tout lire !". La religion est donc un système "à la carte" et les choses se compliquent quand le texte lui-même peut être interprété, ce qui apparaît clairement quand on décline les différentes traductions françaises disponibles, qui peuvent aller jusqu'à se contredire totalement.

Tout commence avec le voyage d'un certain Abraham qui, habitant une région correspondant à l'est de l'actuel Irak, reçoit soudain des messages divins. Il lui est ordonné de se mettre en route. Il chemine d'abord vers Haran ( voir carte ci-dessous) puis descend vers l'actuelle Palestine.

Ces "premiers palestiniens" n'avaient, on s'en doute un peu, que peu de rapport avec ceux qui occupent aujourd'hui le pays, de même que nous n'avons pas grand chose à voir avec les anciens gaulois qui peuplaient la France ou que les tunisiens de Carthage n'ont que peu de rapport avec les phéniciens. C'étaient des Canaéens, des Moabites, différentes tribus constituant un patchwork assez disparate.

Juifs et musulmans se réfèrent à un patriarche commun, Abraham (Ibraïm en arabe). Il est censé avoir eu deux fils, Ismaël d'abord (de sa servante Haagar) puis Isaac, de son épouse Sarah. Issac fera souche en constituant ainsi le point de départ de tout le peuple juif. Quand à Ismaël, c'est le patriarche des musulmans. A ce stade, les histoires diffèrent. Prenez une Bible dans une main et le Coran dans l'autre et... débrouillez-vous. Je ne m'aventurerai pas sur un terrain aussi ... explosif.

L'Ancien Testament raconte avec force détails les différents conflits qui ont pu agiter ce territoire pendant des millénaires. Schématiquement, Moïse est d'abord recueilli par la famille régnante égyptienne, puis prend conscience qu'il est de souche juive et, obéissant aux ordre du dieu des juifs, Yahwey, emmène son peuple hors d'Egypte, vers "la terre promise" (à Abraham). Il n'y pénétrera pas mais c'est Josué qui assurera cette sanglante conquête militaire du territoire, contre les Canaéens, qui disparaissent de l'histoire, après une succession de génocides, où les Hébreux tuent hommes, femmes, enfants, vieillards. Dans la Bible, quoique très explicite sur la nature de l'acte, une ville ainsi rayée de la carte, comme Jéricho est " dévouée par interdit ". Je trouve dommage qu'on ne remplace pas cette expression par " vouée au génocide".

Larousse. Génocide : Crime commis dans l'intention de détruire un groupe humain, national, ethnique, racial ou religieux.

La conquête de la Terre Promise passe par une complète purification ethnique. Vous trouverez rapidement les noms des peuples qui doivent disparaître.

Dans ma BD j'ai reproduis pas mal de cartes, trouvées ici et là. Celle qui suit correspond au premier partage de la terre promise, après deux siècles de conquête. Le partage est effectué entre les différentes tribus d'Israël.

Salomon trouve une solution très efficace pour juguler les conflits inter-ethniques. Il épouse à tour de bras les filles de ses voisins, à commencer par celle du pharaon, son puissant voisin.

Il se montre aussi assez cool vis à vis du culte, musèle la caste de prêtres et autorise même des cultes étrangers (ceux de ses nombreuses épouses) à posséder des temples dans le pays, au grand dam des fondamentalistes. A l'intérieur du pays il procède au redécoupage des parcelles, pour éviter tout conflit entre tribus voisines.

Opérons un grand bon dans l'histoire. Le but n'est pas ici de vous raconter la Bible. En 50 avant Jésus-Christ le romain Pompée prend Jérusalem. Le roi juif de l'époque, Hérode-le-grand joue alors à fond la carte de la collaboration avec l'occupant. A titre de compensation, celui-ci lui laisse reconstruire le temple de manière grandiose (dont les restes constituent "l'esplanade des mosquées" et "le mur des lamentations"). Le dessin ci-après, extrait de ma bande dessinée, montre le gigantisme de ce temple, par rapport à la ville elle-même.

C'est le décor de la tragédie christique. On situe le Golgotha et le jardin de Gethsemani. On distingue aussi le chemin fortifié qu'empruntait Hérode pour se rendre au Temple. Ayant pactisé avec les Romains il craignait sans cesse d'être assassiné. Pour construire ce temple, celui-là même que les fanatiques juifs voudraient reconstruire, voir ce document, il avait du accepter de placer à l'entrée du "Saint des Saints" une effigie de l'aigle romain. C'était ça ou rien.
Le film de Zefirelli "Jésus de Nazareth", bien documenté, nous montre assez bien à quoi pouvait ressembler ce lieu monumental. Les romains, disposant d'une vaste caserne : la forteresse Antonia, attenante au temple, montaient la garde sur les hauts murs qui entouraient "le Parvis des Gentils" où les pèlerins pouvaient en particulier acheter les animaux des offrandes.

Sur le dessin précédent on distingue l'espace clos représentant l'enceinte du temple lui-même, interdite aux non-juifs sous peine de mort. Les monnaies "non-juives" ne devaient également pas y pénétrer. Seuls des sheckels pouvaient être apportés dans ce lieu. D'où la présence de "changeurs" sur le Parvis des Gentils. Dans le dessin suivant, voici à quoi pouvait ressembler l'entrée du temple. Les lévites, les prêtres, se chargeaient des offrandes des fidèles. Un autel monumental permettait de sacrifier des victimes de toutes tailles. On voit sur l'arrière-plan la porte du temple, menant au "Saint des Saint" où seul le Grand Prêtre pouvait pénétrer, une fois l'an. Au dessus de la porte, l'aigle romain, suprême démonstration de l'allégeance des juifs vis-à-vis des occupants, la religion juive interdisant toute représentation humaine ou animale. Rome avait donc imposé la présence d'une idole au dessus de la porte menant au Saint des Saints.

Après la mort d'Hérode-le-Grand un autre Hérode, dit "Hérode Antipas", lui succède. Là encore, nous allons sauter les années. Révolte juive en 72 après JC. Les romains interviennent. Le dernier bastion est le temple, où se sont réfugiés les juifs les plus fanatiques formant la secte dite des Zélotes. Pour venir à bout de ce bastion, les romains "passent par derrière" et choisissent de démolir la forteresse Antonia, leur propre casernement. Ils se retrouvent alors de plain-pied. Sur le dessin, en arrière-plan, le temple, où les prêtres font d'ultimes sacrifices. Devant : le rempart humain formé par les zélotes, vite bousculé par les légionnaires.

Les romains étaient des finisseurs redoutables. Les zélotes s'étaient réfugiés dans une for tresse réputée imprenable construite près de la Mer Morte : Massada. Celle-ci avait été bâtie sur un plateau rocher, une "mesa". Des tous côtés : des flancs abrupts de plus de cent mètres de hauteur. Le romains commencèrent par entourer la place d'un "mur de circonvallation", interdisant toute fuite. Ils crucifièrent tous les juifs qui tentaient de s'échapper. Le sort des occupants de la citadelle était sans mystère : ils allaient tous finir de cette façon, hommes, femmes ou enfants. Mais les réserves en eau et en nourriture de Massada pouvaient permettre aux assiégés de tenir plusieurs années. Les romains entreprirent alors la construction d'une rampe d'un demi kilomètre de long, travail sans précédent. Sur le dessin ci-après on voit son point de départ. Les ouvriers étaient protégés des tirs de flèches et entrecroisaient troncs et pierraille.

Quand le travail fut achevé, cette rampe permettait aux romains d'amener leurs béliers contre les murs. Les milliers de zélotes réfugiés dans l'enceinte se suicidèrent alors. On a trouvé, sur place, les tessons de poterie sur lesquels ils gravèrent leurs noms afin de tirer au sort ceux de ceux qui seraient chargés d'exécuter leurs frères, leurs femmes et leurs enfants.

En 132 après Jésus-Christ, la dernière des révoltes juives, due au fait qu'un Empereur romain, Hadrien, voulait construire un temple à la gloire de Jupiter sur les ruines même du temple juif. Les hébreux furent de nouveaux écrasés et cette fois interdits de séjour en Palestine. Jérusalem fut rebaptisée Aelia Capitolina.

 


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