February 12, 2003
12 février 2003 Traduction par Bruno Nyssen
To contemplate war is to think about
the most horrible of human experiences. On this February day,
as this nation stands at the brink of battle, every American
on some level must be contemplating the horrors of war.
Envisager la guerre, c’est penser à la plus horrible
des expériences humaines. En ce jour de février,
alors que ce pays se trouve au bord de la bataille, chaque américain,
à quelque niveau, se doit de considérer les horreurs
de la guerre.
Yet, this Chamber is, for the most part,
silent -- ominously, dreadfully silent. There is no debate,
no discussion, no attempt to lay out for the nation the pros
and cons of this particular war. There is nothing.
Cependant, cette chambre est en majeure partie silencieuse,
sinistrement, terriblement silencieuse. Il n’y a pas de
débat, pas de discussion, pas de tentative de présenter
à la nation les ‘pour’ et ‘contre’
cette guerre particulière. Il n’y a rien.
We stand passively mute in the United
States Senate, paralyzed by our own uncertainty, seemingly stunned
by the sheer turmoil of events. Only on the editorial pages
of our newspapers is there much substantive (substantif, soutenu
ou substantial, substentiel) discussion of the prudence or imprudence
of engaging in this particular war.
Nous demeurons passivement muets au sénat des Etats-Unis,
paralysés par notre propre incertitude, apparemment pétrifiés
par le tourbillon des événements. Il n’y
a que dans les éditoriaux de nos journaux qu’on
trouve des discussions soutenues à propos de la prudence
ou de l’imprudence de s’engager dans cette guerre
particulière.
And this is no small conflagration we
contemplate. This is no simple attempt to defang a villain.
No. This coming battle, if it materializes, represents a turning
point in U.S. foreign policy and possibly a turning point in
the recent history of the world.
Et ce n’est pas une petite conflagration que nous envisageons.
Ce n’est pas une simple tentative de désarmer un
bandit. Non. Cette bataille à venir, si elle se concrétise,
représente un tournant dans la politique étrangère
américaine et éventuellement dans celle de l’histoire
mondiale récente.
This nation is about to embark upon the
first test of a revolutionary doctrine applied in an extraordinary
way at an unfortunate time. The doctrine of preemption* -- the
idea that the United States or any other nation can legitimately
attack a nation that is not imminently threatening but may be
threatening in the future -- is a radical new twist on the traditional
idea of self defense. It appears to be in contravention of international
law and the UN Charter. And it is being tested at a time of
world-wide terrorism, making many countries around the globe
wonder if they will soon be on our -- or some other nation's
-- hit list. High level Administration figures recently refused
to take nuclear weapons off of the table when discussing a possible
attack against Iraq. What could be more destabilizing and unwise
than this type of uncertainty, particularly in a world where
globalism has tied the vital economic and security interests
of many nations so closely
together? There are huge cracks emerging in our time-honored
alliances, and U.S. intentions are suddenly subject to damaging
worldwide speculation. Anti-Americanism based on mistrust, misinformation,
suspicion, and alarming rhetoric from U.S. leaders is fracturing
the once solid alliance against global terrorism which existed
after September 11.
Cette nation est sur le point de s’embarquer dans le
premier test d’une doctrine révolutionnaire appliquée
d’une façon extraordinaire à un moment regrettable.
La doctrine de prévention* (l’idée que les
Etats-Unis ou toute autre nation puisse légitimement
attaquer une nation qui n’est pas éminement menaçante
mais qui pourrait l’être dans le futur) représente
une nouvelle tournure radicale dans l’idée tradtionnelle
d’auto-défense. Cela se révèle être
en violation de la loi internationale et de la charte des Nations
Unies. Et c’est en train d’être testé
en des temps de terrorisme mondial, ce qui fait se demander
à beaucoup de pays autour du globe s’ils seront
bientôt sur notre liste rouge (ou celle d’une autre
nation). Les hauts responsables du gouvernement ont récemment
refusé d’écarter les armes nucléaires
lorsqu’ils ont discuté d’une attaque possible
contre l’Irak. Qu’est-ce qui pourrait être
plus déstabilisant et imprudent que ce type d’incertitude,
particulièrement dans un monde où la mondialisation
a intimement lié les intérêts économiques
et sécuritaires vitaux de tant de pays? Nos alliances
de longue date se fissurent, et les intentions américaines
sont soudainement l’objet de spéculations préjudiciables
dans le monde entier. L’anti-américanisme, basé
sur une méfiance, une mauvaise information, et sur la
rhétorique alarmante des dirigeants américains,
est en train de détériorer la solide alliance
contre le terrorisme mondial qui a existé après
le 11 septembre.
* le Collins reprend e.a. l’adjectif militaire pre-emptive
: ‘désigné pour réduire ou détruire
la capacité/force d’attaque ennemie avant que celui-ci
puisse l’utiliser’ mais le substantif pre-emption
ne reprend que la signification propre au droit international
: ‘le droit d’un gouvernement d’intercepter
et de saisir pour son propre usage des marchandises ou tout
bien de ressortissants d’un autre pays en transit, spécialement
en temps de guerre’. Il faut ici traduire preemption par
la définition militaire de preemptive, préventif
en français, alors que preemptive n’est apparemment
pas exactement l’adjectif de preemption.
Here at home, people are warned of imminent
terrorist attacks with little guidance as to when or where such
attacks might occur. Family members are being called to active
military duty, with no idea of the duration of their stay or
what horrors they may face. Communities are being left with
less than adequate police and fire protection. Other essential
services are also short-staffed. The mood of the nation is grim.
The economy is stumbling. Fuel prices are rising and may soon
spike higher.
Ici dans notre pays, les gens sont prévenus d’attaques
terroristes imminentes, sans savoir où et quand de telles
attaques pourraient avoir lieu. Des membres de familles sont
appelés à un devoir militaire actif, sans aucune
idée de la durée de leur service ou des horreurs
auxquelles ils devront faire face. Des communautés sont
laissées avec des protections de police et d’incendie
insuffisantes. D’autres services essentiels sont également
en manque de personnel. L’humeur de la nation est sinistre.
L’économie piétine. Les prix pétroliers
augmentent et pourraient bientôt grimper.
This Administration, now in power for
a little over two years, must be judged on its record. I believe
that that record is dismal.
Ce gouvernement, maintenant au pouvoir depuis un peu plus de
deux ans, doit être jugé sur ses résultats.
Je crois que le résultat est sombre.
In that scant two years, this Administration
has squandered a large projected surplus of some $5.6 trillion
over the next decade and taken us to projected deficits as far
as the eye can see. This Administration's domestic policy has
put many of our states in dire financial condition, under funding
scores of essential programs for our people. This Administration
has fostered policies which have slowed economic growth. This
Administration has ignored urgent matters such as the crisis
in health care for our elderly. This Administration has been
slow to provide adequate funding for homeland security. This
Administration has been reluctant to better protect our long
and porous borders.
Au cours de ces deux petites années, ce gouvernement
a gaspillé un excédent estimé de quelque
5.6 trillions de dollars sur la prochaine décennie et
nous a conduit à estimer des déficits jusqu’à
des horizons in(dé)finis.
In foreign policy, this Administration
has failed to find Osama bin Laden. In fact, just yesterday
we heard from him again marshaling his forces and urging them
to kill. This Administration has split traditional alliances,
possibly crippling, for all time, International order-keeping
entities like the United Nations and NATO. This Administration
has called into question the traditional worldwide perception
of the United States as well-intentioned, peacekeeper. This
Administration has turned the patient art of diplomacy into
threats, labeling, and name calling of the sort that reflects
quite poorly on the intelligence and sensitivity of our leaders,
and which will have consequences for years to come.
En politique étrangère, ce gouvernement a négligé
de trouver Osama Ben Laden. En fait, encore hier, nous l’avons
encore entendu rassembler ses forces et les pousser à
tuer. Ce gouvernement a divisé les alliances traditionnelles,
nuisant éventuellement à jamais aux instances
internationales de maintient de l’ordre comme les Nations
Unies ou l’Otan. Ce gouvernement a transformé en
suspicion l’habituelle perception internationale des Etats-Unis
comme bien intentionnés et gardiens de la paix. (ndla:
hem! Qui y croyait encore?) Ce gouvernement a transformé
l’art patient de la diplomatie en menaces, étiquettes
et injures du genre qui offrent un piètre reflet de l’intelligence
et la sensibilité de nos dirigeants, et qui auront des
conséquences pour les années à venir.
Calling heads of state pygmies, labeling
whole countries as evil, denigrating powerful European allies
as irrelevant -- these types of crude insensitivities can do
our great nation no good. We may have massive military might,
but we cannot fight a global war on terrorism alone. We need
the cooperation and friendship of our time-honored allies as
well as the newer found friends whom we can attract with our
wealth. Our awesome military machine will do us little good
if we suffer another devastating attack on our homeland which
severely damages our economy. Our military manpower is already
stretched thin and we will need the augmenting support of those
nations who can supply troop strength, not just sign letters
cheering us on.
Traiter des chefs d’états des Pygmées,
cataloguer des pays entiers comme étant le diable, dénigrer
de puissants alliés européens est hors de propos.
Ce genre de manque de conscience grossier ne peut pas faire
de bien à notre grande nation. Nous pouvons avoir une
puissance militaire massive, mais nous ne pouvons pas combattre
seuls dans une guerre mondiale contre le terrorisme. Nous avons
besoin de la coopération et de l’amitié
de nos alliés de longue date, autant que celles de nos
récents alliés que nous pouvons attirer avec nos
richesses. Notre redoutable machine de guerre ne sera que peu
de chose si nous avons à subir une autre attaque dévastatrice
sur notre sol, ce qui nuit sévèrement à
notre économie. Notre main d’oeuvre militaire est
déjà en train de s’amenuiser et nous allons
avoir de plus en plus besoin du soutien de ces pays qui peuvent
fournir des troupes, pas seulement signer des lettres d’encouragement.
The war in Afghanistan has cost us $37
billion so far, yet there is evidence that terrorism may already
be starting to regain its hold in that region. We have not found
bin Laden, and unless we secure the peace in Afghanistan, the
dark dens of terrorism may yet again flourish in that remote
and devastated land.
La guerre en Afghanistan nous a jusqu’ici coûté
37 milliards de dollars; c’est cependant une preuve que
le terrorisme peut déjà être en train de
regagner son emprise dans cette région. Nous n’avons
pas trouvé Ben Laden, et à moins que nous ne maintenions
la paix en Afghanistan, l’antre sombre du terrorisme prospérera
déjà de nouveau dans ce lointain pays dévasté.
Pakistan as well is at risk of destabilizing
forces. This Administration has not finished the first war against
terrorism and yet it is eager to embark on another conflict
with perils much greater than those in Afghanistan. Is our attention
span that short? Have we not learned that after winning the
war one must always secure the peace?
Au Pakistan également il y a un risque de déstabilisation
des forces. Ce gouvernement n’a pas encore terminé
la première guerre contre le terrorisme et est cependant
impatient de s’embarquer dans un autre conflit dont les
risques sont beaucoup plus grands que ceux en Afghanistan. Est-ce
l’étendue de notre attention est si courte? N’avons-nous
pas appris qu’après avoir gagné la guerre,
on doit toujours maintenir la paix?
And yet we hear little about the aftermath
of war in Iraq. In the absence of plans, speculation abroad
is rife. Will we seize Iraq's oil fields, becoming an occupying
power which controls the price and supply of that nation's oil
for the foreseeable future? To whom do we propose to hand the
reigns (il s’agit plutôt de reins les rênes
du pouvoir) of power after Saddam Hussein?
Et cependant nous prêtons peu d’attention aux répercussions
d’une guerre en Irak. En absence de projet, la spéculation
à l’étranger est abondante. Allons-nous
saisir les champs de pétrole irakiens, devenant une puissance
d’occupation qui contrôle le prix et l’approvisionnement
en pétrole de cette nation dans l’immédiat?
A qui proposons-nous de donner les rênes du pouvoir après
Saddam Hussein?
Will our war inflame the Muslim world
resulting in devastating attacks on Israel? Will Israel retaliate
with its own nuclear arsenal? Will the Jordanian and Saudi Arabian
governments be toppled by radicals, bolstered by Iran which
has much closer ties to terrorism than Iraq?
Est-ce que notre guerre va enflammer le monde musulman, aboutissant
à une attaque dévastatrice sur Israël? Est-ce
qu’Israël va répliquer avec son propre arsenal
nucléaire? Est-ce que les gouvernements de Jordanie et
d’Arabie saoudite vont être renversés par
les radicaux, soutenus par l’Iran, qui a plus de liens
étroits avec le terrorisme que l’Irak?
Could a disruption of the world's oil
supply lead to a world-wide recession? Has our senselessly bellicose
language and our callous disregard of the interests and opinions
of other nations increased the global race to join the nuclear
club and made proliferation an even more lucrative practice
for nations which need the income?
Est-ce qu’une perturbation de l’approvisionnement
mondial en pétrole peut conduire à une récession
mondiale? Est-ce que notre insensé discours belliqueux
et notre insensible indifférence des intérêts
et opinions des autres nations accélère la course
mondiale pour joindre le club nucléaire et faire de la
prolifération une pratique encore plus lucrative pour
les nations qui ont besoin de ces revenus?
In only the space of two short years
this reckless and arrogant Administration has initiated policies
which may reap disastrous consequences for years.
En l’espace de seulement deux courtes
années, ce gouvernement insouciant et arrogant a lancé
des politiques dont les conséquences pourraient être
désastreuses pendant des années.
One can understand the anger and shock of any President after
the savage attacks of September 11. One can appreciate the frustration
of having only a shadow to chase and an amorphous, fleeting
enemy on which it is nearly impossible to exact retribution.
On peut comprendre la colère et le bouleversement d’un
président après l’attaque sauvage du 11
septembre. On peut apprécier la frustration d’avoir
seulement une ombre à chasser et un ennemi éphémère
dont il est presque impossible de réclamer un châtiment.
But to turn one's frustration and anger
into the kind of extremely (?? Manque-t-il un mot?) currently
witnessing is inexcusable from any Administration charged with
the awesome power and responsibility of guiding the destiny
of the greatest superpower on the planet. Frankly many of the
pronouncements made by this Administration are outrageous. There
is no other word.
Mais transformer cette frustration et cette colère en
cette espèce de situation extrême dont nous sommes
témoin est inexcusable de la part d’un gouvernement
responsable de la redoutable puissance et de la conduite de
la destinée de la plus grande super-puissance de la planète.
Franchement, beaucoup de déclarations faites par ce gouvernement
sont scandaleuses. Il n’y a pas d’autre mot.
Yet this chamber is hauntingly silent.
On what is possibly the eve of horrific infliction of death
and destruction on the population of the nation of Iraq -- a
population, I might add, of which over 50% is under age 15 --
this chamber is silent. On what is possibly only days before
we send thousands of our own citizens to face unimagined horrors
of chemical and biological warfare -- this chamber is silent.
On the eve of what could possibly be a vicious terrorist attack
in retaliation for our attack on Iraq, it is business as usual
in the United States Senate.
Cependant cette chambre demeure mortellement silencieuse. A
la veille de ce qui est certainement l’horrible infliction
de mort et de destruction de la population de la nation irakienne
(une population, j’ajouterais, qui à plus de 50%
est âgée de moins de 15 ans), la chambre est silencieuse.
A quelques jours de l’envoi probable de milliers de notre
propres citoyens, qui vont braver des horreurs inimaginables
de guerre chimique et biologique, la chambre est silencieuse.
A la veille de possibles représailles terroristes suite
à notre attaque en Irak, c’est un jour comme un
autre au Sénat des Etats-Unis.
We are truly "sleepwalking through
history." In my heart of hearts I pray that this great
nation and its good and trusting citizens are not in for a rudest
of awakenings.
Sincèrement, nous marchons comme des somnambules
à travers l’Histoire. Je prie de tout mon cœur
pour que cette grande nation et ses bons et loyaux citoyens
n’aient pas le plus rude des réveils.
To engage in war is always to pick a
wild card. And war must always be a last resort, not a first
choice. I truly must question the judgment of any President
who can say that a massive unprovoked military attack on a nation
which is over 50% children is "in the highest moral traditions
of our country". This war is not necessary at this time.
Pressure appears to be having a good result in Iraq. Our mistake
was to put ourselves in a corner so quickly. Our challenge is
to now find a graceful way out of a box of our own making. Perhaps
there is still a way if we allow more time.
Envisager la guerre, c’est toujours tirer une carte au
hasard. Et la guerre doit toujours être la dernière
solution, pas un premier choix. Je dois sincèrement mettre
en doute la décision de n’importe quel président
qui affirme qu’une attaque militaire sur une nation composée
à 50% d’enfants est ‘la plus haute tradition
morale de ce pays’. Cette guerre n’est pas nécessaire
en ce moment. La pression semble obtenir de bons résultats
en Irak. Notre erreur a été de nous mettre dans
un coin si rapidement. Notre défi est de maintenant trouver
un moyen honorable de nous sortir de la situation dans laquelle
nous nous sommes mis. Peut-être y a-t-il encore un moyen
si nous nous accordons plus de temps. (ndla: hélas, …)
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