Le Space Weapons Program américain
L’Air Force américaine soumet actuellement à
l’approbation du Président Bush une directive intéressant
la sécurité de la Nation et visant à développer
de nouvelles armes offensives et défensives. On lira
sur ce sujet un article détaillé du New York Times
en date du 18 mai 2005 (http://www.nytimes.com/2005/05/.......VfbtZ8wdA).
Ce projet risque, disent certains observateurs, d’être
présenté par les alliés (et les potentiels
ennemis) des Etats-Unis comme relançant une nouvelle
course aux armements dans l’espace. Il s’agirait
d’un changement important dans la politique de défense,
compte tenu de la politique suivie depuis les décisions
du président Clinton en 1996. Jusqu’ici l’espace
était réservé, au plan militaire, à
l’observation de l’application des traités
de démilitarisation et de non-prolifération, ainsi
qu’au renseignement.
La mise en œuvre de la directive visant à déployer
des armes spatiales provoquera beaucoup de difficultés
financières, technologiques, politiques et diplomatiques,
bien qu’aucun traité international n’interdise
explicitement de telles armes, selon les porte-paroles officiels
de la Maison Blanche. Une décision positive est attendue
dans les prochaines semaines.
En fait, selon les représentants
de l’Air Force, il ne s’agit pas de mettre des armes
en orbite, mais de se donner un libre accès à
l’espace pour des actions défensives ou offensives.
Dans cette perspective, le Pentagone aurait déjà
dépensé des milliards de dollars pour préparer
des systèmes d’armes et les modalités de
leur déploiement. Ceci avait été recommandé
en janvier 2001 par une commission présidée par
le ministre de la défense nouvellement nommé Donald
Rumsfeld. Suite à ces propositions,
le Président Bush s’était retiré
de l'Antiballistic Missile Treaty qui interdisait le déploiement
d’armements dans l’espace.
Il ne fait plus de doute aujourd’hui
que pour l’Air Force, le concept de suprématie
spatiale absolue suppose la liberté d’attaquer
aussi bien que celle de se défendre à partir de
l’espace ("freedom to attack as well as freedom from
attack in space").
Ceci nécessitera de nouvelles armes, de nouveaux types
de satellites, de nouveaux moyens de coopération avec
les forces armées. Les obstacles technologiques seront
énormes et les crédits sont estimés devoir
atteindre les centaines de milliards de dollars. Il faudra aussi
convaincre les « alliés » que la frontière
des Etats-Unis s’étend dorénavant à
l’espace, mais ce jusque dans quelles limites ?
L’Air Force a élaboré une nouvelle stratégie,
dite Global Strike, qui suppose la mise
au point d’un avion spatial dit «common aero vehicle
», porteur d’armes guidées représentant
une demi tonne de munitions. Il s’agira selon le général
Lord déposant devant le Congrès d’une «
incroyable capacité de destruction des centres de commandement
et de lancement de missiles où qu’ils soient dans
le monde ». Il pourrait atteindre
sa cible en 45 minutes après un demi tour du monde. La
mise au point de ce véhicule est considérée
comme la priorité maxima.
L’Air Force a déjà réalisé
divers prototypes de telles armes, dont nous avons présenté
les essais dans notre revue. On citera
notamment le XSS-11, un micro-satellite capable de brouiller
les satellites de communication et de reconnaissance des autres
nations. Le Pentagone n'a pas caché qu'il n'hésiterait
pas à utiliser de tels armes pour détruire les
satellites des "alliés" qui leur porteraient
ombrage, par exemple les satellites du futur programme européen
Galiléo au cax où ceux-ci auraient été
développés avec la participation de pays réputés
ennemis comme la Chine.
Un autre programme, significativement dénommé
les “Verges de Dieu” (Rods From God) vise à
précipiter de l’espace des cylindres de tungstène,
titanium or uranium appauvri afin de pénétrer
en profondeur des objectifs terrestres. Arrivant à des
vitesses de 10.000 km/h, ils auraient l’effet de petits
obus atomiques.
Un troisième programme utilisera
des rayons laser ou des ondes radio-électriques susceptibles
d’immobiliser ou détruire des troupes et matériels
au sol.
Le général James E. Cartwright, chef de l’United
States Strategic Command, a expliqué récemment
à la sous-commission du Sénat compétente
pour la question des armements nucléaires que
l’objectif était de permettre à la nation
de “délivrer une attaque très rapidement,
sans long plannings préparatoires , n’importe où
à la surface de la Terre.
Mais beaucoup de sénateurs se sont inquiétés.
Comment la Russie, l’Union Européenne, la Chine
et l’Inde vont-elles réagir. Et que feront les
Etats-Unis si l’un de ces pays décidait à
son tour de développer de telles armes. Faudra-t-il
en venir à des frappes préventives ? Ce
discours raisonnable a été relayé par Teresa
Hitchens, vice présidente du Center for Defense Information,
Think Tank qui analyse et critique la politique du Pentagone.
« L’espace doit rester un domaine international
non militarisé ni militarisable”.
De plus, les budgets évoqués par l’Air
Force elle-même (de 220 milliards à 1 trilliard)
paraissent hors de portée. La frappe unitaire passerait
de 600.000 dollars avec un Tomahawk à 100 millions de
dollars avec les systèmes proposés. D’ores
et déjà, les “simples” satellites
de reconnaissance et d’observation voient leurs coûts
au moins tripler. C’est le cas du nouveau programme de
satellites-espions dit Future Imagery Architecture, dont le
coût est de 25 milliards (et dont les résultats
seraient d’ailleurs décevants). Ces coûts
ne seraient supportables que si l’ensemble des systèmes
d’armes actuels étaient reconvertis, ce qui parait
à la fois utopique et dangereux.
Mais le général Lord considère
que toutes ces objections ne tiennent pas. « La supériorité
spatiale est notre destin. Il s’agit aujourd’hui
d’une mission devant être conduite quotidiennement.
Mais il s’agit aussi d’une vision pour le Grand
Futur ».
On peut supposer que les industriels qui espèrent profiter
de ces flots de milliards, non seulement pour développer
des armes mais pour réinvestir le savoir-faire dans le
civil, partagent totalement ce point de vue. 22/05/05
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